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Tendance... Etes vous nudge ?


lundi 13 avril 2009

Le nudge, c'est la nouvelle tendance à la mode aux Etats-Unis. Une théorie développée par Cass Sunstein, un proche de Barack Obama. Voilà comment elle s'applique à l'énergie...


To nudge =  pousser doucement quelqu’un du coude pour attirer son attention. Le nudge est une petite bourrade amicale.

Le mot est repris dans un livre à succès (Nudge : Improving Decisions About Health, Welth and Happiness) par deux grands universitaires américains, Richard Thaler, un spécialiste de l’économie comportementale (qui associe à la science économique les connaissances de la psychologie), et Cass Sunstein, professeur de droit à Harvad, devenu depuis un des collaborateurs proches de Barack Onama, chef d'un service des régulations, ce qui bien sûr a changé la dimension du "nudge"...
 
La couverture du livre est explicite : un gros éléphant (l’Etat) pousse un éléphanteau (l’individu). Mais pas n’importe comment : doucement, presque tendrement…
Une vision à verser au grand débat sur la régulation.

Car le concept du « nudge » cherche à dégager une troisième voie entre les interventions rigides de l’Etat (très mal vues aux Etats-unis et souvent associées à la tradition démocrate) et un laissez-faire dogmatique, dont l’Amérique a voulu sortir après 8 années de présidence Bush.

Le « nudge », c’est l’idée de convaincre sans forcer, de créer un environnement favorable à la prise de bonnes décisions, notamment en commençant par informer largement le citoyen pour qu’il prenne conscience de la situation réelle et décide lui-même de la solution vertueuse. Les deux auteurs ont une expression plus scientifique pour qualifier ce coup de coude amical : le paternalisme libertaire !

L’un des grands champs d’application –avec la santé et la protection sociale- est l’énergie et la lutte contre le réchauffement planétaire. Cass Sunstein est d’ailleurs un défenseur convaincu de l’environnement.

Le site Ilovepolitics.com, qui n’hésite pas à voir dans le nudge la véritable révolution Obama, cite un passage du livre :

« Le gouvernement devrait créer un Inventaire des gaz à effet de serre, requérant une divulgation de la part des plus gros pollueurs. L’Inventaire permettrait aux gens de voir les diverses sources de gaz à effet de serre aux Etats-Unis et de suivre les changements au fil du temps. En voyant une telle liste, les Etats et les collectivités pourraient répondre en prenant des mesures législatives. Le plus vraisemblablement, les groupes d’intérêts, y compris les membres des médias, attireraient l’attention sur les pollueurs les plus importants » (p. 191), entraînant des « coups de pression », des corrections de comportement, de la même façon que de nombreuses grandes marques américaines ont rapidement agi dès que de la publicité avait été faite sur le fait qu’elles employaient des enfants pour confectionner leurs produits.

Le site Grist a réalisé une interview de Cass Sunstein. Quelques extraits :

Qu’est-ce que le nudge ? Et que peut bien vouloir dire paternalisme libertaire ?

Un nudge est un petit changement dans le contexte social qui fait que les comportements se mettent à changer radicalement sans forcer personne à faire quelque chose. Le concept derrière le paternalisme libertaire est qu’il est possible de conserver la liberté de choix -donc l’idée libertaire- tout en faisant évoluer les gens dans des directions qui améliorent leurs vies – d’où l’idée de paternalisme. Nous pensons possible de combiner ces deux concepts. Et beaucoup de gens qui ont des idées différentes peuvent adhérer à cette nouvelle philosophie.
(…)

L’approche du nudge serait, en matière de consommation d’énergie dans l’habitat et le transport automobile, de montrer clairement aux gens ce que leur coûtent, à eux personnellement, leurs habitudes. Quand nous conduisons, la plupart d’entre nous n’ont pas une idée précise de ce que cela coûte par an en carburant selon le plus ou moins bon rendement du véhicule. Une solution nudge est de permettre aux mauvais acteurs de voir le coût économique de leur attitude.

Y-a-t-il donc une dimension morale dans les nudges environnementaux ? Ou est-ce simplement une question de signaux aux marchés ?

Je pense que sur beaucoup de problèmes, y compris environnementaux, on peut progresser sans s’enliser dans de grands débats qui divisent les gens. Le système des prix peut être utilisé d’une façon qui colle avec les obligations morales. Si vous causez du tort à des tiers mais que cela a un coût financier de plus en plus élevé, alors vous commencerez sans doute à moins léser les autres. Une des grandes tâches de la prochaine décennie sera de faire en sorte que les gens qui créent des risques pour les autres du fait de leurs comportements quotidiens en supportent le prix.
(…)

Les “nudges” reposent sur une foi profonde dans la capacité des gens à faire les bons choix. Mais est critiquable de vouloir imposer des normes et des régulations strictes quand on est face à un risque de catastrophe mondiale ?

En matière de climat, je suis favorable à une forme de taxe carbone ou de droits d’émissions. Mais cette dernière solution n’est pas assimilable à de la régulation stricte, car elle est beaucoup plus flexible. L’avantage est que vous pouvez atteindre le même but à moindre coût pour l’économie et que vous pouvez donc être d’autant plus ambitieux dans la fixation de vos objectifs.

2 commentaire(s)
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Commentaire par Alain Richard
mardi 14 avril 2009 16:41
Le "nudge" pose bien le problème mais ne le résoud pas. Regulation ou marché, certes l'idéal serait une regulation douce, où les citoyens comprennent où est leur intérêt et ne sont pas égoïstes. Où les pays émergents ou ps émergents du tout sont patients et attendent tranquillement que les gentils Occidentaux aient compris et fassent un peu de place. Bref, un monde de raison et de sagesse. Comme sans doute le campus de Harvard. Oui, mais c'est pas souvent le cas...
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Commentaire par Bof
lundi 20 avril 2009 10:40
Je ne suis pas "nudge", je suis "grudge". Grudge=rancune contre ces administrations américaines, de Clinton à Bush et demain Obama, qui ont toujours cherché le développement de leur propre industrie et agriculture, au mépris des règles commerciales, sociales et environnementales...Le tout dans des emballages cadeau ficelés par de gentils profs d'Harvard.