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sgsf
Sur la route de Copenhague : Obama et Hatoyama sur le front
mardi 15 septembre 2009
Aux Etats-Unis et au Japon, des leaders fraîchement élus tentent d’insuffler à leurs pays une réelle volonté de changement en matière environnementale. Un effort qui laisse perplexes les pays en développement où l'impératif économique domine.
Au Japon, le nouveau Premier Ministre issu du parti démocrate, Yukio Hatoyama, prend une position offensive dans la lutte contre le réchauffement climatique. Il effectue ainsi un virage radical dans la politique environnementale du Japon, pays de nature plutôt indifférente au réchauffement climatique, en se disant prêt à réduire ses émissions de CO2 de 25% d’ici 2020, sur la base de 1990. Cette initiative, si elle aboutissait, représenterait 5% de plus de réduction que le paquet climat-énergie de l’UE. Son prédécesseur, du parti libéral démocrate, parti en place depuis près de 60 ans au Japon, n’avait proposé qu’une baisse de 8%.
Aux Etats-Unis, si l’élection de Barack Obama a incontestablement ouvert une nouvelle page dans la politique énergétique et environnementale du pays, à trois mois de la conférence de Copenhague, rien n’est joué. Le projet de loi qu’il a présenté, le 27 juin 2009 devant la Chambre des Représentants, The American Clean Energy and Security Act, passé de justesse (à sept voix près), doit être discuté début octobre au Sénat. Ce projet, qui fixe un objectif intermédiaire de réduction des émissions de 17% de réduction des GES par rapport à 2005 en 2020, devrait brutalement accélérer la marche après 2020 - 42% de réduction en 2030 pour atteindre 83% en 2050.
La discussion, qui sera certainement une bataille serrée, pourrait mettre en danger tout compromis à Copenhague. Aussi, aux vues de cet agenda national -avec en toile de fond la réforme de l’assurance maladie- et international dense, les Etats-Unis restent, à cette heure, plutôt discrets sur leurs intentions.
En Europe, en revanche, les ministres des affaires étrangères français, britannique, danois, espagnol, finlandais et suédois se sont mis d’accord sur cinq grands engagements en vue de Copenhague, qu’ils ont rendus publics en publiant une tribune dans de grands quotidiens nationaux, dont Le Figaro.
Ainsi, l’Europe s’engage à contrôler le réchauffement climatique, qui ne pourra excéder 2°C, et à financer des mesures équitables pour mettre en œuvre ce contrôle.D’autre part, elle propose de mettre en œuvre son réseau diplomatique pour convaincre les pays réticents à agir sur les changements climatiques, et d’inscrire en tête de l’ordre du jour international les risques liés à ces changements. Enfin, les Etats-membres devront réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 30% d’ici à 2020.
Pour venir en aide aux pays en développement dans la lutte contre le réchauffement climatique l’Union Européenne serait prête à débourser jusqu’à 15 milliards d’euros, alors qu’elle avait précédemment annoncé un chiffre de 13 à 24 milliards. Cette baisse de 10 milliards de la borne haute n’a pas manqué de soulever des interrogations chez les Verts Européens, d’autant que les experts du GIEC chiffrent l’aide totale nécessaire à près de 100 milliards d’euros par an : «En nous abreuvant de chiffres l’UE semble vouloir nous masquer la réalité» a déclaré Claude Turmes, du parti Vert Luxembourgeois, un bon spécialiste du dossier de l'environnement. (Voir aussi l'article de notre contributeur régulier Eloi Laurent dans le JDD)
Au Canada, les divisions entre Ottawa et Québec sur les questions climatiques restent vives. Le Premier Ministre québécois Jean Charest a déclaré, jeudi dernier, qu’il profiterait de Copenhague pour faire entendre la position du Québec sur les cibles de diminution des émissions de gaz à effet de serre, malgré la résolution du gouvernement fédéral à s'exprimer d'une seule voix. Il a également confié son inquiétude quant à la décision prise par celui-ci de prendre l'année 2006 comme référence pour ces objectifs de diminution alors que le Monde entier, à l'exception des Etats-Unis, a opté pour 1990.
Le Brésil veut servir de pont entre pays industrialisés et en développement afin de favoriser la conclusion d'un accord contre le réchauffement, a indiqué son ministre de l'Environnement, Carlos Minc dans un entretien accordé à l'AFP, au lendemain de l'annonce par le président français Nicolas Sarkozy d'une "position commune" entre les deux pays."Pour l'atténuation de l'effet de serre, l'adaptation des pays pauvres et la lutte contre la déforestation, nous évaluons les besoins à 800 milliards de dollars par an entre 2010 et 2020. C'est beaucoup. Mais la santé de la planète vaut bien celle des banques", note-t-il.
Le Premier ministre danois Lars Loekke Rasmussen a effectué du 10 au 12 septembre une visite de travail en Inde pour tenter d'accélérer les négociations sur le climat et parvenir à un accord au sommet de Copenhague en décembre. L'Inde, troisième pollueur de la planète, redoute que la lutte contre le réchauffement n'entrave sa forte croissance économique et rejette sur les pays riches la "responsabilité historique" du changement climatique. Tout comme la Chine, elle refuse de s'engager sur des réductions chiffrées d'émissions de CO2 dans un traité international. Si le Premier ministre indien veut bien offrir la prospérité à sa population et il ne veut pas, par conséquent, s'engager dans des réductions contraignantes de CO2 si le monde n'apporte pas de nouvelles technologies à son pays. Le Danemark et l'Inde ont signé, à cette occasion, un accord de coopération sur l'environnement.
L’Afrique du Sud, qui est l’Etat le plus pollueur du continent africain, n’achèvera pas ses ambitions de réduction de gaz à effet de serre si cela doit heurter son développement économique et ses besoins énergétiques, massivement dépendants des centrales à charbon. Si la première puissance économique africaine se dit prête à prendre ses responsabilités pour tenter de réduire ses émissions, elle se mettra d’accord sur des objectifs précis, considérés par Themba Maseko, porte-parole du gouvernement sud-africain, comme prématurés.
Via AFP et Reuters
Il est surtout important de suivre les Etats-Unis. Leur position sera déterminante, et le débat au sénat, certainement enflammé.