Par Remy Prud'homme
- Professeur émérite à l'Université de Paris XII
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Professeur émérite à l'Université de Paris XII, il a fait ses études à HEC, à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de l'Université de Paris, à l'Université Harvard,...
Rémy Prud'homme : pour une politique alternative plus efficace en faveur du climat
Par Remy Prud'homme
- Professeur émérite à l'Université de Paris XII
mardi 04 novembre 2008
Dans un long article documenté, Rémy Prud'homme , universitaire, ancien directeur adjoint de l'environnement à l'OCDE, juge sévérement les politiques française et européenne de lutte contre le réchauffement cimatique. Partant du rapport Stern, il propose une autre voie : aider les pays pauvres et émergents à contrôler leurs émissions de CO2, bien plus redoutables que celle des pays européens.
La conclusion du Pr Prud'homme :
Le problème du réchauffement climatique, considéré ici comme un problème majeur, est un problème mondial et complexe. Il ne sera pas résolu par des politiques hexagonales et simplistes. Les bons sentiments ne permettent pas de faire l’économie des bonnes analyses.
L’efficacité d’une politique ne se mesure pas à la peine qu’elle inflige.
La politique française, symbolisée et résumée par le Grenelle de l’Environnement, consiste à se fixer des objectifs de réduction irréalistes (pour ne pas dire franchement ridicules) et à en tirer un catalogue de mesures planificatrices contraignantes, sans souci de leur coût pour l’économie de la France. On a montré que cette politique conduisait à une impasse. Elle a un coût considérable en termes de pouvoir d’achat et de finances publiques (- 4% en pouvoir d’achat et 20 milliards d’euros par an dans l’immédiat, peut-être dix fois plus pour atteindre en 2050 les objectifs français affichés). Elle nous conduit dans la voie de la « décroissance » voulue implicitement (et maintenant explicitement) par les militants environnementalistes. Mais surtout, cette politique a un effet négligeable, et peut-être même négatif, sur les rejets de gaz à effet de serre du globe. L’idée que notre flagellation ostentatoire aura un effet d’ «exemplarité » est une illusion : notre efficacité actuelle, qui est très grande, n’est absolument pas suivie par les grands gaspilleurs que sont les Etats-Unis et surtout les pays en développement.
Il existe heureusement une politique alternative qui serait à la fois moins coûteuse et plus efficace - qui réduirait à un coût acceptable les rejets de gaz à effet de serre au niveau désiré. Il faut d’abord comprendre que le combat contre le réchauffement climatique doit se mener chez les grands gaspilleurs, là ou les contenus en carbone sont élevés. C’est là que sont les véritables gisements de réduction de rejets de gaz à effet de serre. C’est là que l’on peut réaliser les réductions nécessaires à un coût acceptable pour l’humanité. Mais parce que ces grands gaspilleurs sont généralement des pays pauvres, ils n’engageront pas cet effort de réduction sans une aide financière de la part des pays riches.
Nous devons donc à la fois exercer une pression sur ces pays inefficaces en carbone en mettant l’accent sur notre propre efficacité (au lieu de la cacher comme nous le faisons actuellement) et, soyons réalistes, mettre en place une « assistance carbone ». On peut imaginer, par exemple, une taxe carbone à taux unique (25 € par tonne de CO2 rejetée est un bon ordre de grandeur) payée par tous les pays — pour l’efficacité — accompagnée du transfert aux pays pauvres d’une bonne partie du produit de la taxe payée par les pays riches — pour la justice.