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 - Ingénieur et démographe

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Ingénieur des mines, démographe, Dominique Bidou a été directeur de la Qualité de la Vie au Ministère de l'environnement. Il est président d'honneur de l'Association HQE (Haute qualité environnementale)...

Danger : la crise affecte aussi les énergies renouvelables


jeudi 30 avril 2009

La crise touche des usines de l'économie «d’avant». Mais elle touche aussi le secteur des énergies renouvelables, comme l'usine SILPRO dans les Alpes de Haute-Provence. Où est l'erreur ?


Dans la presse comme dans la classe politique, plusieurs voix se sont émues de l’absence ou quasi absence du développement durable et du réchauffement climatique au dernier G20, à Londres.  Le discours et les faits semblent diverger.  La relance de l’économie mondiale semble avoir oublié l’écologie et l’effet de serre. Les paradis fiscaux sont bien sûr un vrai problème, et il n’y aura pas de régulation véritable sans leur intégration dans un système mondial, mais comment oublier pour autant les besoins financiers de la nécessaire mutation des modes de production et de consommation ?

Il est vrai que le Président Nicolas Sarkozy a demandé à d’éminents économistes, notamment le prix Nobel Stieglitz, de faire des propositions sur d’autres indicateurs de santé économique que le PIB. Mais dès que ça va mal, on ne parle plus que de croissance et de PIB. Les vieux réflexes ont la vie dure. La crise comme moteur du changement, ce n’est pas si sûr. Le retour aux vieilles recettes est toujours un danger.

Dans plusieurs domaines, il est permis d’être inquiet, notamment dans les secteurs qui demandent des efforts importants pour arriver à l’équilibre, comme les énergies renouvelables. Donnons quelques exemples.

L’usine SILPRO en cours de construction  à Saint Auban, dans les Alpes de Haute-Provence est en difficulté. Il s’agit de fabriquer du silicium pour les cellules photovoltaïques. Projet bien utile, car la montée de la demande en cellules a provoqué des tensions sur le marché du silicium, avec des hausses de prix significatives. Il était temps de créer des capacités supplémentaires de production, pour éviter que les aides publiques ne soient juste la compensation de la pénurie. Et voilà qu’un des partenaires se retire pour faute d’argent. Il ne peut plus apporter sa contribution au bouclage du projet, au beau milieu des travaux. La baisse relative de la demande liée à la crise a permis, pour le moment, de résorber la pénurie de silicium dans le monde. Le ralentissement que la crise provoque pour de nombreux projets entraîne une surproduction et une baisse des prix, en attendant la reprise. Que des usines de l’économie « d’avant » soient en difficulté, on peut le comprendre, que ce soit dans un secteur réputé d’avenir est plus inquiétant. Où est l’erreur ?

Les énergies nouvelles demandent encore un effort important de recherche pour parvenir à l’équilibre financier.  Il faut multiplier par quatre l’efficacité des cellules photovoltaïques ; il faut investir sur le stockage et le transport de l’énergie ; le potentiel gigantesque des énergies de la mer ne sera pas valorisé sans une forte dose de recherche et d’expériences, etc. Avant la crise (2006), la dépense publique en France de recherche en énergie était déjà très faible pour les énergies renouvelables :  52 millions d’euros, 9 fois moins que la recherche pour l’énergie nucléaire(477), sur un total de 797. La crise permettra-t-elle de renforcer cet effort ?

La question n’est pas que française. Les revers dans les essais de nouveaux dispositifs de captation des énergies renouvelables se paient au prix fort. Témoin les mésaventures du projet PELAMIS, initié par des intérêts britanniques et expérimenté au large des côtes portugaises. Ce projet consiste à récupérer l’énergie des vagues. D’immenses serpents métalliques sont immergés pour cela, mais la mise au point est difficile. Toujours des problèmes de tuyauterie, de joints, de corrosion. Ce sont les aléas techniques ordinaires, auxquels il faut faire face. Pour cela il faut de l’argent frais. Voilà qu’un des investisseurs est victime de la crise, et tout est arrêté, pour l’instant tout du moins.  Toutes ces techniques en devenir, qui se cherchent, avec des erreurs de jeunesse encore à attendre, sont fragilisées par la crise.

Heureusement, malgré une mortalité accrue des projets, le secteur reste vivace, et d’autres projets voient le jour. PELAMIS, par exemple, semble appelé à  une nouvelle aventure au large de la Réunion, qui espère produire dès 2015 environ 5% de son énergie à partir des vagues.
Ne soyons pas trop pessimistes, les énergies renouvelables progressent dans le monde, mais la crise se fait sentir aussi dans ce domaine et pourrait freiner le mouvement, retarder quelques  projets importants. Un optimisme béat ne serait pas raisonnable. Il faudra encore beaucoup d’énergie humaine pour maintenir le rythme, et nous savons qu’il faut faire vite, ça chauffe !

Le blog de Dominique Bidou

Photo - image virtuelle d'une ferme marine - copyright pelamis wave power
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