Par Hervé Nifenecker
- Président fondateur de Sauvons Le Climat
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Ingénieur et docteur ès sciences, Hervé Nifenecker est Président fondateur du collectif  Sauvons le Climat, qu'il a créé en 2004. Il s'exprime sur "la chaîne Energie" à titre personnel...
La pollution plus dangereuse que les retombées de Fukushima
Par Hervé Nifenecker
- Président fondateur de Sauvons Le Climat
lundi 17 mars 2014
Les Parisiens ne sont pas vraiment impressionnés par la pollution atmosphérique actuelle...alors que le risque de la radioactivité suscite toujours une grande peur. Et conduit à des évacuations de population très traumatisantes.
De son côté le gouvernement japonais, obéissant aux normes érigées par la CIPR (Commission Internationale de Protection contre les Radiations), envisage d'autoriser les populations à se réinstaller autour de Fukushima dans des zones caractérisées par une radioactivité inférieure à 20 mSv/an. Rappelons que 110000 personnes ont été évacuées sans autre forme de procès à la suite de la catastrophe.
Devant la différence de traitement dans le cas de la pollution atmosphérique et dans celui de la pollution radioactive, on s'attend à ce que le danger de celle-ci soit beaucoup plus important que le danger de celle-là. Or, pour atteindre la même perte d'espérance de vie acceptée par les Parisiens, il faudrait qu'une population soir soumise pendant 5 ans à une dose d'irradiation 100 fois plus élevée que la norme (1 mSv/an) et 5 fois plus élevée que la limite de 20 mSv/an vers laquelle tendent les autorités japonaises. Le calcul de la perte d'espérance de vie par suite d'irradiation est disponible sur le site http://vizille-sciences.org/perte_de_vie.php.
La question de l'évacuation
Mais si on peut estimer assez facilement la perte d'espérance de vie due à un supplément d'irradiation (ce qui ne semble, d'ailleurs, jamais fait ni par les autorités ni par les médias) il est plus difficile d'estimer les conséquences sanitaires de l'évacuation elle-même. L'évacuation des populations des environs de Tchernobyl, les arrachant à leur cadre de vie et leur faisant perdre leur emploi, a eu des conséquences durables et considérables : dépressions, troubles psychosomatiques, addictions à l'alcool et aux drogues, désintégration des familles. Une évolution similaire semble se reproduire autour de Fukushima. Toutefois les autorités japonaises envisagent le retour d'une partie des populations, tout en donnant aux candidats au retour les moyens d'évaluer le risque d'irradiation auquel ils seraient soumis. Cette démarche va dans le bon sens, mais pourquoi avoir attendu si longtemps et pourquoi fixer arbitrairement une valeur maximale de l'irradiation à 20 mSv/an ?
Il faut absolument que les dégâts humains des politiques d'évacuation soient évalués. Si, dans le cas d'une catastrophe nucléaire, on peut envisager une évacuation de courte durée (typiquement un mois) en attendant que la situation se stabilise le maintien des mesures d'évacuation doit faire l'objet d'une véritable analyse en termes de coûts et de bénéfices et cette politique doit être discutée par les populations et les individus concernés directement. Certains d'entre eux, après avoir été dûment informés des risques encourus, pourraient décider de rester sur place, d'autres, au contraire, pourraient quitter la région contaminée et être réinstallées ailleurs dans de bonne condition.
Cette réévaluation des politiques d'évacuation se fera d'autant plus vite que les évacués engageront des procédures contre les responsables de ces politiques, comme cela semble se produire au Japon.
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[Réponse de l'auteur]
Ce n'est pas moi qui ait inventé les 6 mois de perte d'espérance de vie. On nous en a rebattu les oreilles pendant une semaine. Ceci étant les parisiens vont souvent mourir en province dans des maisons de retraite.
[Réponse de l'auteur]
Félicitations pour la profondeur de votre pensée et le style avec lequel vous la présentez. Et malgré tous ces maux les français ont une espérance de vie qui augmente de 3 mois tous les ans, alors qu'elle est déjà de 80 ans. EN tous cas,bien d'accord avec vous....Mort aux cons (vaste programme nous disait De Gaule)
[Réponse de l'auteur]
Je ne m'attaque pas au diesel (j'en ai un d'ailleurs). Mais je me réfère aux données de l'AFSSET, qui a démontré que les microparticules résultant de la combustion du diesel étaient toxiques. Les risques sont intimement liés à la vie elle-même. Ce que je souligne c'est que les risques encourus par la mise en oeuvre des réacteurs nucléaires sont bien inférieurs à ceux consécutifs à l'utilisation des moteurs diesels. Ceci étant la production d'électricité par les centrales à charbon allemandes sont à l'origine de 10000 morts par an dans le public. Et pour l'ensemble de l'Europe l'utilisation des centrales à charbon est à l'origine de 40000 morts par an.
[Réponse de l'auteur]
Voir le site de Jean Marc Jancovici http://www.manicore.com/documentation/petrole/danger_charbon.html et sur le site de SLC: http://www.sauvonsleclimat.org/etudeshtml/les-dangers-du-charbon/35-fparticles/950-les-dangers-du-charbon.html
[Réponse de l'auteur]
Je ne sais pas précisément quelles sont les hypothèses de calcul des décès dus à la pollution atmosphérique. Je crois qu'elles reposent surtout sur des données épidémiologiques qui ne présupposent pas une relation linéaire sans seuil. L'étude pionnière est celle de Dockery et al. de Harvard qui a suivi des centaines de milliers d'individus pendant 7 ans en reliant l'incidence des cancers au niveau de la pollution dans laquelle ils avaient vécu une dizaine d'années auparavant.