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Auteur
Diplômé de l'Ecole Supérieure d'Electricité (Supélec), Nicolas Goldberg est consultant en Energie. Il est intervenu chez plusieurs acteurs majeurs du domaine de l'énergie,...

Energie photovoltaïque : tout sur les nouveaux tarifs de rachat


jeudi 18 février 2010

La baisse des tarifs de rachat de l'électricité solaire est une bonne chose : en plus d'avoir mis fin à un phénomène de spéculation dans la filière, ce recadrage a permis l'envoi d'un signal prix garantissant la tenue des objectifs environnementaux.


Le 14 janvier dernier, la presse annonçait que l’Etat avait "désamorcé" la bombe des tarifs de rachat du photovoltaïque. En effet, le super tarif de rachat des installations intégrées au bâti est passé à 58c€/kWh et n’est plus disponible pour les installations agricoles et les centres commerciaux : seuls les particuliers, les écoles et les hôpitaux pourront en profiter.

Dans ce contexte de bouleversement des prix, le photovoltaïque peut-il toujours être considéré comme l’eldorado des investisseurs en France ? Les objectifs d’accroissement du parc photovoltaïque français sont-ils toujours d’actualité ? Sia Conseil s’est intéressé à la rentabilité du secteur et aux défis environnementaux du photovoltaïque afin de répondre à ces questions.

Le solaire en France : tarifs de rachat à toute épreuve pour objectifs ambitieux

Les engagements du Grenelle Environnement prévoient que d’ici 2020, 1% de l’énergie électrique consommée devra être d’origine photovoltaïque, soit environ 6 TWh, ce qui correspond à 4 fois la consommation électrique de la ville de Nice. Pour cela, environ 5 400 MWc de panneaux devront être installés. Ces objectifs sont d’autant plus louables que la France accuse un certain retard par rapport à l’Allemagne et l’Espagne qui disposent respectivement de 5 300 MWc et de 3 200 MWc installés pour décarboner leur électricité . Pourtant, ces engagements peuvent paraître inatteignables sachant que la France ne disposait en 2007 que d’une puissance de 70 MWc raccordés au réseau et qu’il reste encore aujourd’hui 5 000 MWc à pourvoir pour atteindre la cible.

Ainsi, pour rattraper nos voisins européens, l’Etat a envoyé un signal fort aux investisseurs : tout kWh d’électricité photovoltaïque produit et injecté sur le réseau d’une installation intégrée au bâti était alors racheté par EDF à 60c€, soit 6 fois le prix du kWh fourni aux particuliers. Pour donner de la visibilité, ces tarifs sont garantis pendant 20 ans ce qui assure une rentabilité élevée de l’investissement. De plus, le fait que les installations doivent être intégrées au bâti permet de faire d’une pierre deux coups : les investisseurs, obligés de refaire les toits, peuvent en profiter pour améliorer l’isolation, et donc la performance énergétique du bâtiment.

Les demandes de raccordement en attente laissent penser que les objectifs ambitieux seront atteints. L’incitation était efficace et les investissements ont suivi : la puissance installée a quasiment triplé de 2008 à 2009. Entre autres, pour les particuliers, Sia Conseil a calculé sur le graphique ci-dessous que le retour sur investissement était bien supérieur à 10% (hors effet de levier financier).

 



















Délai de retour sur investissement pour une installation chez un particulier avec les anciens tarifs de rachat (3kWc intégré au bâti)

Source : Sia Conseil

Suivant le même modèle élaboré par Sia Conseil, les fermes photovoltaïques et les centrales de taille moyenne, généralement construites par des fournisseurs alternatifs, étaient aussi rentables avec des retours sur investissements atteignant pour les meilleurs un peu moins de 10%. Mais avec les changements de réglementation du mois dernier, ces investissements sont-ils toujours profitables ?

La nouvelle réglementation de janvier 2010 : quelles conséquences ?

Entre novembre et décembre 2009, plus de 3 000 demandes quotidiennes d’éligibilité au tarif de rachat ont été reçues par EDF et ERDF. Certaines étaient, comme l’a indiqué Jean-Louis Borloo, dans les Echos, plus que douteuses : des constructions d’ombrières de parking inoccupés ou la transformation de champs agricoles en hangars avaient pour seul objectif de profiter des tarifs de rachat avantageux, détournant ainsi la réglementation de son véritable objectif. Pour éviter les effets pernicieux des tarifs de rachat, les ajustements suivants ont été décidés :

-    Ne seront éligibles pour la prime de rachat à 58c€/kWh, si l’installation est intégrée au bâti, que les particuliers, les écoles et les hôpitaux. La prime de rachat est fixée à 50c€/kWh pour les autres installations, à conditions que la puissance installée ne dépasse pas 3kWc.
-    Les fermes photovoltaïques au sol resteront rentables avec un retour sur investissement autour de 8%. De plus, pour mieux répartir les fermes sur le territoire et éviter de les concentrer dans le sud, le tarif de rachat de l’énergie au kWh dépendra de la région : le kWh de photovoltaïque sera donc racheté plus cher dans le nord (car moins ensoleillé) pour inciter les investisseurs à y construire des fermes. Ce point témoigne d’une volonté de l’état de continuer à envoyer un signal prix aux investisseurs afin de développer l’énergie photovoltaïque sur l’ensemble du territoire et non pas uniquement dans le sud de la France, où jusqu’à présent se concentraient  l’ensemble de la production.
-    Les centrales solaires de taille moyenne (de 10 à 100 kWc) verront leur rentabilité chuter à un niveau ne les rendant plus attractifs. Ce type de centrale était en majeure partie l’origine de la spéculation qui visait à transformer certains bâtiments, agricoles ou commerciaux, surdimensionnés en taille, en « machine à cash » photovoltaïque.

En marge de cela, les tarifs de rachat seront dégressifs de 10% par an à partir de 2012 pour garantir la parité réseau  d’ici 2020 et ne pas pénaliser le portefeuille des consommateurs sur le long terme . Par ailleurs, et c’est une première mondiale, un tarif de surimposition à 42c€/kWh voit le jour pour les installations photovoltaïques installées sur un toit mais non intégrée au bâti.

Comme le montrent les schémas ci-dessous, le photovoltaïque est donc toujours rentable pour les projets qui sont légitimes :










 














Délai de retour sur investissement pour une installation chez un particulier avec les anciens et les nouveaux tarifs de rachat (3kWc intégré au bâti)

Source : Sia Conseil
 

















Délai de retour sur investissement pour une ferme solaire avec les anciens et les nouveaux tarifs de rachat (5kWc au sol)
Source : Sia Conseil

La décision d’intervenir sur les tarifs de rachat est donc louable : l’Etat a produit un signal prix qui garantit la tenue des objectifs environnementaux et le développement de cette nouvelle technologie tout en mettant fin aux spéculations qui détournaient l’esprit de la réglementation. Il reste néanmoins à établir quel sera l’avenir du photovoltaïque à l’arrivée de la parité réseau et si la France pourra profiter de la deuxième génération de solaire à couche mince pour se positionner en tant que challenger du secteur.

Voir le blog Energies & Environnement de Sia Conseil

 
3 commentaire(s)
[1]
Commentaire par Ferre Mathieu
jeudi 18 février 2010 11:16
La baisse du tarif sur bâtiment agricol a 0,42c n'est pas réflechi car se n'est pas avec des installation de 3kwc sur des maisons que la France pourra atteindre ses objectifs. Le photovoltaïque sur batiment agricol avec des puissances souvent comprise entre 36 et 150 kwc lui le permet. De plus, le photovoltaïque permettait aux agriculteurs d'autofinancer leurs bâtiments et non pas de faire des bénéfices dessus pour la plus grande partie des cas. Le photovoltaïque permettait aussi de créer des emplois en consiel, fabriquant, constructeur, poseur, commercial... mais aujourd'hui les nouveaux tarifs ne le permettent plus. Encor une bonne décison du gouvernement, merci Jean-Louis.

[Réponse de l'auteur]
Certes, mais autofinancer les bâtiments agricoles ou les ombrières de parking n'étaient pas la vocation du photovoltaïque. Comme l'indique l'article, les fermes photovoltaïques au sol sont toujours très rentables et le nombre de demandes de raccordement qui explose toujours chez ErDF laisse penser que les objectifs se portent bien. Reste à savoir comment réduire les délais de raccordement mais c'est une autre histoire...
[2]
Commentaire par Bouron Didier
vendredi 19 février 2010 20:54
la baisse du tarif était peu-etre justifiée pour arreter la speculation mais elle deverait s'appliquer a toute les installations sinon pour ma par, j'assimile cela a une subvention deguisée en plus du credit d'impot. De plus les centrales au sol vont encore retirer des terres aux agriculteurs qui en manquent tant afin de nourrir les populations qui meurent de faim dans le monde.
mais au fait j'allais oublier de préciser que en france tout le monde mange chaque jour a sa faim et que l'on ne detruit pas la foret tropicale pour produire de la nourriture: à mediter!!!!
[3]
Commentaire par Gérard
samedi 20 février 2010 16:24
Le photovoltaique comme installation pour les particuliers n’a plus d’avenir. On peut se poser la question pourquoi de nombreux gouvernements européens réduisent la voilure en baissant notamment les subventions accordées jusqu'à aujourd’hui. La réponse n’est très difficile a trouver. Un lobby très puissant alliant la finance et des sociétés industrielles européennes viennent après plusieurs années de lobbysme intense de lancer le projet DESERTEC. Ce projet gigantesque prévoie dans une première phase la fourniture à hauteur de 15% des besoins en énergie électrique de l’Europe a partir de centrales solaires implantées au Maghreb, en Lybie et en Egypte. Ce projet gigantesque estimé a environ 400 Milliards d’Euros va démarrer par la construction d’une première unité au Maroc. D’autre devront être rapidement implantées en Algérie, Tunisie et Egypte. L’énergie électrique produite sera transportée sous forme de courant continue à l’aide de câbles qui reliront le Maghreb avec l’Espagne, La Sardaigne et L’Italie. Ce projet gigantesque est sur le plan technique arrivé a maturité et les financements ont été trouvés. Le lobby de l’atome emmené par la France fait de la résistance mais le combat pratiquement terminé. De nombreux réacteurs européens arrivent en fin de cycle et la nouvelle génération n’est pas prête de prendre la relève. Le projet DESERTEC s’est engouffré dans la brêche.
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