Par Bertrand Barré
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Né en décembre 1942, ingénieur physicien de formation, Bertrand Barré est ancien conseiller scientifique d'AREVA voir son blog) Entré en 1967 au Commissariat à l'Energie Atomique (CEA),...
Deux réponses simples aux climato-sceptiques
Par Bertrand Barré
mardi 16 mars 2010
Est-il vraiment légitime d'appeler à la rescousse le viking Eric le Rouge dans le débat sur le réchauffement de la planète ? La question du climat mérite d'être traitée avec sérénité et bon sens.
Le Groupe Intergouvernemental d’Etude des Climats, le GIEC, a reconnu avoir laissé passer des coquilles dans son dernier rapport : les "climatosceptiques" en font des gorges chaudes et une grande partie de la presse leur offre une tribune complaisante. Au-delà de l’agitation médiatique, que disent ceux qui ne croient pas à la responsabilité des hommes dans le réchauffement climatique global ? Je réponds ici à deux arguments très répandus :
1. "Durant toute l’ère quaternaire, le climat terrestre a varié considérablement, alternant âges glaciaires et périodes tempérées, et nous n’étions pas là pour causer ces changements."
Exact, mais on connait la cause de ces changements passés, déclenchés par des variations périodiques de plusieurs paramètres de l’orbite terrestre, variations qui ont modifié l’ensoleillement de l’hémisphère nord de notre planète, où sont rassemblées la plupart des terres émergées. Une fois déclenché, le réchauffement ou le refroidissement s’est poursuivi jusqu’au bout sous l’effet de "rétroactions positives" (par exemple, les terres déglacées absorbent plus d’énergie solaire que la glace, qui en réfléchit une grande partie). C’est parce qu’on comprend ces mécanismes naturels que l’on peut dire que le réchauffement actuel n’est pas de même nature.
2. "Au cours du dernier millénaire, il s’est produit aussi de grandes variations : optimum climatique du moyen âge, petit âge glaciaire du XVIIIè siècle, etc. Le tout, sans rapport avec l’effet de serre."
Ces variations ont effectivement affecté l’Europe, probablement pas toute la planète, mais la question n’est pas là. Le réchauffement que l’on attribue à la modification de l’effet de serre par suite des activités humaines est beaucoup plus récent, et il est surtout encore à venir…
Dans mon enfance, avant 1950, nous écoutions la "TSF" à table en famille, dans un gros poste à lampes qu’il fallait bousculer de temps en temps pour atténuer les parasites. Je me souviens notamment d’une émission à succès qui s’intitulait fièrement "40 millions de Français". Le transistor n’était pas découvert, la télévision en noir et blanc était encore une curiosité hors de prix et la voiture, un grand luxe. Nous sommes aujourd’hui 64 millions de Français avec, presque tous, télévision, voiture, téléphone portable, machine à laver, etc. A l’école, j’apprenais que l’empire des Indes comptait 400 millions d’habitants : Inde, Pakistan et Bangladesh totalisent aujourd’hui plus du triple et leur mode de vie change très vite – heureusement. Pourquoi ce petit accès de nostalgie ? Pour illustrer l’enchaînement suivant :
Si les émissions humaines de gaz à effet de serre ont commencé à augmenter dès le début de l’ère industrielle, ce n’est que depuis 1950 qu’elles se sont multipliées, sous les effets combinés de la croissance démographique, de la croissance économique et, désormais, de la mondialisation. Ce n’est que depuis les années 70 que la modification de la composition de l’atmosphère est devenue sensible, et ce n’est que depuis les années 90 que le réchauffement induit est devenu indubitable.
Le Groenland était-il vert du temps d’Eric le Rouge(1) ? Je ne sais pas. Mais je sais que la température moyenne de la surface terrestre a augmenté dans la deuxième moitié du XXè siècle : augmentation modeste, mais à un rythme qui n’a rien de géologique. Et c’est bien le réchauffement à venir qui est en question. Une question préoccupante…
Voir le blog de Bertrand Barré
(1) Le viking Eric le Rouge est celui qui a baptisé "Terre Verte", Groenland, la grande île qu’il avait découverte, du temps de l’optimum médiéval déjà mentionné. Certains historiens pensent qu’il a exagéré le caractère tempéré – tout relatif - pour inciter ses compatriotes à partir coloniser cette île…
Je ne le sais pas non plus, si ce n'est que les fontes constatées par endroit ont laissé apparaitres des vestiges de cette ère.
"Mais je sais que la température moyenne de la surface terrestre a augmenté dans la deuxième moitié du XXè siècle : augmentation modeste, mais à un rythme qui n’a rien de géologique."
Ce rythme est tout à fait comparable à la baisse des températures qui ont causées le "petit âge glaciaire" aux XVIIIeme siècle en quelques dizaines d'années le climat s'est considérablement refroidit en europe... tout comme il se refroidit en différents endroits du globe.
Quant à la petite histoire des banquises nord et suds qui fonderaient inexorablement c'est là totalement faux.
http://nsidc.org/arcticseaicenews/
Notez aussi que si les glaces sont particulièrements faibles dans l'ouest canadien nombres de glaciers s'étendent en alaska.
Pour l'anecdote, dans les années 70 la majorité des gens pensaient que l'activité humaine nous conduirait vers un refroidissement climatique :)
http://www.sott.net/image/image/s1/30179/full/time_iceage.jpg
http://www.time.com/time/magazine/article/0,9171,944914,00.html
... alors s'alarmer sur une hausse de température globale de 0.5°C (mesurée avec une précision de +/-0.7°C) ça me fait plutôt sourire!
[Réponse de l'auteur]
Justement, ce n'est pas la hausse de 0,7°C qui m'inquiète, mais le risque de hausse de plusieurs degrés à venir (et je dis bien "risque"). BB
le rapport de l'I.O.P.(http://www.publications.parliament.uk/pa/cm200910/cmselect/cmsctech/memo/climatedata/uc3902.htm) est très accablant et nul doute qu'il pèsera lourd dans les conclusions des représentants du Parlement Britannique.
Autre sujet avec la mondialisation et les délocalisations nous déplaçons notre pollution ce qui ne règle pas pour autant le problème
[Réponse de l'auteur]
Bonjour Je lis la presse étrangère, mais j'essaie de prendre du recul par rapport au "climategate" qui ne fait que détourner du sujet de fond. Je suis tout à fait d'accord avec votre autre remarque : la délocalisation ne fait que déplacer la pollution... BB