Par Richard Loyen
- Délégué général d'ENERPLAN
Auteur
Richard Loyen est Délégué Général d'ENERPLAN, association professionnelle de l'énergie solaire.
Né en 1975, Bac E en 1993, DUT en génie électrique en 1995, Formation spécifique sur l’énergie solaire à ...
"Il faut organiser des Etats-Généraux du solaire"
Par Richard Loyen
- Délégué général d'ENERPLAN
lundi 01 mars 2010
Après plus d'un mois d'incertitude et d'attente, les producteurs d'électricité solaire photovoltaïque sont enfin fixés : un récent communiqué du gouvernement a permis de nuancer la baisse des tarifs de rachat du kwh, et surtout, de clarifier le traitement de la rétroactivité...
Voir également l'interview d'Arnaud Mine (responsable du solaire au Syndicat des Energies Renouvelables)
LCE : Le communiqué de presse (modifiant les annonces faîtes le 13 janvier dernier) du gouvernement du 17 février vous a-t-il rassuré ?
Richard Loyen : Oui, il a en tout cas mis fin à une période d’incertitude d’un mois, pendant laquelle une très grande part des moyens et gros projets solaires –ceux de plus de 36kWattt- étaient bloqués. Ce communiqué a permis une clarification dans le traitement de la rétroactivité ; même si celle-ci est toujours délicate au regard du droit; qui plus est dans une application sectorielle. Nous attendons aujourd’hui la formalisation (légale) pour lever nombre d’ambigüités.
Les grands vainqueurs de cette nouvelle lecture de l’arrêté sont les agriculteurs. Comment l’expliquez-vous? Etes-vous en accord avec cette marche arrière du gouvernement ?
Je ne crois pas qu’il faille stigmatiser les agriculteurs. Ils ne sont pas seuls responsables de l’émergence de cette fameuse bulle spéculative, constituée en bonne part d’« hangars alibis ». S’ils sont parvenus à obtenir le maintien du tarif de 58 centimes pour des installations intégrées à des bâtiments agricoles réels et utiles, c’est grâce à leur syndicat, qui bénéficie d’une longue expérience de plaidoyer. Il ne s’agit pas de pointer du doigt tel ou tel secteur, mais de comprendre ce qui n’était pas forcément adapté dans l’ancien tarif, pour un segment du marché photovoltaïque.
Aujourd’hui, le gouvernement semble vouloir différencier « bon » et « mauvais » projets en fonction de leur puissance, en prenant la décision de faire passer le tarif d’achat de l'électricité des installations intégrées au bâti de plus de 250 kWc (kilowatts-crête) de 58 centimes (ancien tarif) à 42 centimes le kWh (kilowatt-heure), soit une baisse d'environ 28%, et ce de manière rétroactive (toutes les demandes effectuées après le 1er novembre). Etes-vous d’accord avec cette distinction ?
Oui et non. Il y a nombre de moyens et grands projets développés de bonne foi, sur la base de la parole de l’Etat. Le gouvernement se livre à un exercice peu fluide, voire laborieux, pour écrêter la file de demandes. S’il va globalement dans le bon sens, pour nous, les critères d’éligibilité devraient être objectifs : l’obtention ou non des autorisations d’urbanisme, et l’existence d’une demande complète de devis de raccordement (proposition technique et financière). En outre, pour les prochaines évolutions des tarifs, il faudrait peut-être redéfinir la qualification (le seuil) des « gros projets », en intégrant les différences de coûts pour les distinguer.
Auriez-vous des propositions à soumettre au gouvernement avant parution du décret «final» ?
Cette période d’incertitudes aura au moins permis de mettre en exergue l’importance de structurer notre filière, qui est en pleine émergence. Nous aurions besoin aujourd’hui d’une véritable concertation pragmatique et efficace, réunissant tous les acteurs du secteur autour d’une table, afin de remettre à plat le pilotage de la filière, pour tenir compte des évolutions conjoncturelles et structurelles pour atteindre (voir dépasser) les objectifs du Grenelle. Organiser de véritables Etats-Généraux du solaire permettrait aux décideurs politiques de ne plus agir de manière inaudible, dans l’urgence.
Propos recueillis par Léa-Sarah Goldstein
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Reste à savoir quels moyens à mettre en place pour diminuer les délais de raccordement...
C'est une absurdité que l'on puisse gagner de l'argent dans une même année en injectant 1000 kWh de solaire PV en été et en soutirant 2000 kWh de électrique en hiver (pointe). Aburdité économique (cf. prix de gros hiver/été), mais aussi physique: une utilisation thermique de l'électricité PV n'a que très rarement du sens pour des raisons de rendement.
Le comble de l'absurdité est atteint lorsqu'on rémunérer de cette manière un producteur PV installé à côté d'une centrale nucléaire!
A minima, il faudrait limiter l'effet d'aubaine au remboursement du coût de l'installation et au prix d'un kWh ordinaire (minoré d'une taxe d'entretien du réseau). Ces contraintes de bon sens sont je crois appliquées en Australie.
Les coupables dans cette affaire sont en apparence les législateurs, élus et payés pour écrire ou voter des textes applicables, après en avoir étudié les impacts de long terme en se faisant conseiller par des experts. Mais à y regarder de plus près c'est le "grenellisme" qui est en cause. Ce mode de gouvernance issu du marketing est une calamité dont il faudra un jour mesurer les dégâts.