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Ancienne responsable d’une agence de conseil en communication, Sophie d’Anhalt a quitté le monde de la publicité pour celui de la presse professionnelle de l’environnement...
Pour les hypermarchés, «économiser l'énergie = consommer plus»
jeudi 03 mai 2012
Les hypermarchés ont trouvé un moyen astucieux d'utiliser le système des Certificats d'Economie d'Energie pour conduire leurs clients à acheter plus chez eux. Ces derniers convertissent généralement les kWh épargnés en calories alimentaires...
Adoptée le 13 juillet 2005, la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique nous impose de baisser notre consommation de kilowattheures. Pour nous y aider, le texte a institué les certificats d'économie d'énergie (CEE).
Inspirés des exemples italien et britannique, ce dispositif est assez astucieux. Il oblige les énergéticiens (EDF, GDF Suez) et les distributeurs d'énergie (Total, les exploitants de stations service, les fioulistes) à faire réaliser des économies d'énergie à leurs clients, sous peine de fortes pénalités financières.
Entre 2010 et 2013, ces vendeurs d'énergie (que l'on appelle les « obligés ») doivent faire baisser la demande de leurs clients publics et privés de 345 TWh : l'équivalent des deux tiers de la demande d'électricité annuelle française ! Pas si mal.
Concrètement, les choses ne sont pas très simples. Les clients des « obligés » doivent réaliser des travaux améliorant la performance énergétique de leur logement, de leur bâtiment public (pour une collectivité locale), de leur usine (une entreprise), voire de leur péniche (pour les bateliers). Validés par la Dreal, ces travaux donnent droit aux certificats d'économie d'énergie dont les « obligés » ont besoin pour remplir leurs obligations légales. Seuls « obligés » durant la première période (2006- 2010), les énergéticiens ont essuyé les plâtres, sans trop de douleur : leur objectif n'était que de 54 TWh ! Depuis, le niveau de l'objectif a sexptuplé et la grande distribution (en tant que détaillants de carburants et de fioul) qui est entrée dans la danse.
Comme souvent, c'est Leclerc qui a ouvert le bal. La firme dirigée par Michel-Edouard Leclerc a fait de cette contrainte énergétique un produit d'appel. Via son site internet , l'enseigne bretonne octroie des « primes énergie » à ses clients qui réalisent des travaux. En contrepartie, l'enseigne récupère les précieux certificats. Les primes sont distribuées sous forme de chèques-cadeaux, valables uniquement dans les centres... Leclerc. ( Par exemple, écrit Leclerc sur son site, pour l'installation d'une pompe à chaleur type air-eau dans une maison individuelle de 120 m2, située à Amiens, vous recevrez 495 € en " primes énergie".)
Auchan a adopté le même système. Comme son concurrent à l'enseigne bleue, le groupe de la famille Mulliez loue les services de la société « Économie d'énergie ». En toute transparence, celle-ci gère traite les dossiers des clients avides de chèques-cadeaux et collecte les CEE pour le compte des deux groupes.
Avec un certain succès. « En 2011, les 100 000 dossiers que nous avons traités ont généré une économie d'énergie totale de 10 TWh », confirme Myriam Maestroni, présidente d'Économie d'énergie. Auchan est aussi enthousiaste : « Pour le moment, estime Bruno Lipczak, le patron d'Auchan Carburant, nous montons 15 000 dossiers par an. De quoi réduire la demande d'énergie de 1,6 TWh/an, alors que notre objectif, pour les trois ans de cette période, est de 4 TWh. »
Mais, au fait, que font ces milliers de clients de tous leurs bonus ? Selon une étude conduite par Économie d'énergie, 72 % des dépenses engagées dans les magasins Auchan avec la carte Waaoh portent sur des produits alimentaires. Rien de superflu, donc