Participez aux débats sur l'énergie de demain

Auteur
Stéphane Meunier, 37 ans, est Directeur Associé en charge du Pôle Energie & Utilities de Sia Conseil. Il travaille depuis 10 ans pour des énergéticiens français et européens sur leurs projets de transformation...

Economies d’énergies dans la maison : les CEE, kesaco ?


lundi 16 mars 2009

La meilleure façon d'assurer nos besoins en énergie est de ne pas en gaspiller. Remplacer sa chaudière ou mettre un double vitrage donne bonne conscience, mais ce n’est pas suffisant


Comment améliorer de façon spectaculaire l’isolation des maisons, des appartements et des bureaux, élément décisif dans la palette des économies d’énergie ?

D’abord en poussant les ménages –de même que les collectivités ou les PME- à investir dans des travaux efficaces. Depuis des années des incitations fiscales y incitent les contribuables et le prêt à taux zéro vient de s’ajouter à cet arsenal.

Ensuite, en mettant à contribution les fournisseurs d’énergie : améliorez votre efficacité énergétique et incitez vos abonnés et clients à engager des travaux, sinon c’est vous qui serez pénalisés. C’est le principe des CEE, les certificats d’économie d’énergie.

Mis en place par la loi POPE (1) en 2006 pour une durée de trois ans, le mécanisme des CEE prévoit des pénalités financières (2 centimes d’euros / kWh) pour les fournisseurs qui ne réalisent pas les objectifs fixés par l’Etat. Le projet de loi Grenelle II qui sera soumis au Parlement d’ici la fin du mois confirme le dispositif. Il sera même renforcé, pour inciter les consommateurs à engager, malgré la crise, des travaux d’isolation plus ambitieux, à la hauteur des objectifs fixés par le Grenelle de l’Environnement à l’horizon 2020.

Concrètement, les clients concernés par cette mesure sont les particuliers, les collectivités locales, les établissement publics, et toutes les entreprises non soumises au système des quotas de CO2. Les vendeurs d’électricité, de gaz, de chaleur, de froid et de fioul domestique doivent les amener à réaliser des économies d'énergie au travers d’un champ d’initiatives très ouvert (apport d’information, incitations financières, service de préfinancement, diagnostic gratuit..).

L’objectif national fixé en début de période est réparti entre les fournisseurs selon le type d’énergie et leur poids respectif dans la consommation finale d’énergie. Les principaux concernés sont EDF (55%) et GDF SUEZ (25%).

Les travaux éligibles sont décrits dans des fiches d’opérations standardisées. Une liste d’actions qui s’enrichit progressivement, on en compte aujourd’hui plus de 220 (le tableau ci-dessous présente les plus populaires).

En contrepartie du constat des investissements effectués par les consommateurs grâce à ces actions, les vendeurs d'énergie reçoivent des certificats sur la base de forfaits en kWh calculés par type d'action.
Pour la 1ère période, l’objectif de 54 TWh (1 terawattheure = 1 million de kWh ) était relativement modeste. Inférieur à 1% de l’énergie finale consommée en France chaque année. Pour 2012, le niveau devrait être 2 à 3 fois supérieur.

Même si cela reste loin de la multiplication par 18 proposée par l’ADEME lors du Grenelle de l’Environnement, l’enjeu financier est loin d’être négligeable. L’ensemble des certificats qui devront être collectés représente entre 2,2 et 3,2 Milliards d’euros de pénalités potentielles, selon le scénario retenu…
Un montant qui peut faire peur au regard du retour d’expérience sur 2006-2009. En effet, à quatre mois de l’échéance, à peine 2/3 des CEE ont été validés. Même si les fournisseurs d’énergie ont récemment accéléré leur collecte et affichent leur confiance, l’analyse détaillée des actions réalisées est inquiétante.
Selon la lettre d’information des Certificats d’Economies d’Energie publiée en janvier 2009 par le MEDDAD , moins de 15% des opérations réalisées concernent l’isolation de l’habitat, qui est pourtant le fondement des économies d’énergie.

Par contre, près de 60% des actions menées concernent le remplacement de système de chauffage par des chaudières performantes ou par des pompes à chaleur. Des actions qui optimisent la quantité de combustible pour produire une même quantité d’énergie mais qui n’améliore en rien les déperditions d’énergie du bâtiment.

En fait, pendant cette période d’apprentissage du dispositif de CEE, il y a fort à parier que les fournisseurs d’énergie se sont contentés de se positionner sur des tendances de marché préexistantes telles que le remplacement de chaudière obsolète ou le double-vitrage. Facile et pas cher ! Il suffisait de mettre en place des partenariats avec les installateurs pour leur apporter des prospects en échange des certificats.

En fixant un objectif plus ambitieux, l’Etat va intensifier la concurrence entre les fournisseurs d’énergie pour capter les certificats les moins coûteux et générer une raréfaction progressive des actions les plus faciles.
Pour la prochaine période des CEE, il faudra donc investir pour convaincre les clients de réaliser des travaux plus complexes tels que l’isolation des toitures, des murs et des planchers. Des investissements qui devraient peser sur les résultats financiers de nos énergéticiens car le maintien des tarifs réglementés ne permettra pas de répercuter l’ensemble des coûts induits par cette obligation règlementaire.



[1] Programme d'Orientation de la Politique Energétique française

Stéphane Meunier est directeur associé du cabinet SIA-Conseil et animateur de son blog énergie.

Photo Sophia Winters - Fotolia.com
PARTICIPEZ !
Cet espace est le vôtre !
La chaîne Energie de LExpansion.com
vous ouvre ses colonnes. Partagez vos analyses !
Auteur
Stéphane Meunier, 37 ans, est Directeur Associé en charge du Pôle Energie & Utilities de Sia Conseil. Il travaille depuis 10 ans pour des énergéticiens français et européens sur leurs projets de transformation...

Lire la suite

Du même auteur