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European Energy Review est un portail en anglais publié depuis les Pays-Bas et consacré aux questions de l'énergie. Rédacteur en chef : Karel Beckman. Correspondant à Paris : Yves de Saint Jacob.
La Turquie va s’arrimer au réseau électrique européen
mercredi 07 octobre 2009
Le président turc Abdullah Gul arrive à Paris et rencontrera vendredi Nicolas Sarkozy, qui a affiché son opposition à l’entrée de la Turquie dans l’UE. « Un turco-sceptique », dit-on à Ankara! Mais cela n’empêche pas les coopérations : Ankara prépare pour 2011 le raccordement de son réseau électrique à celui de l’Europe
Mais, quoi qu’il arrive, un secteur spécifique au moins sintégrera : en 2011, l’électricité turque sera dans l'Europe.
RTE (Réseau de Transport d'Electricité), la filiale d'EDF qui gère les grands réseaux, joue un rôle important dans ce processus, et vient de passer deux ans à aider son homologue turc, TEIAS, à préparer un arrimage du réseau turc au système continental européen.
«L’arrimage, c’est l’interconnexion synchrone qui permet à l’ensemble des réseaux qui sont à l’intérieur d’un même système de battre et de fonctionner à l’unisson. Cela veut dire que toute fluctuation, soit sur l’offre, soit sur la demande, intervenant dans n’importe quel pays, se trouve répartie et compensée par l’ensemble des autres. Donc c’est vraiment l’expression d‘une solidarité électrique qui va dans le sens du renforcement de la sécurité de l’alimentation», explique Dominique Maillard, président de RTE, lors d’une visite à Ankara.
Après des tests en 2010, l’opération devrait être effective en 2011. La Turquie sera branchée sur le système continental européen. Celui-ci ne correspond pas tout à fait à l’UE : les îles (Grande-Bretagne et Irlande) n’y sont pas, pas plus que les pays scandinaves, historiquement reliés entre eux, ou les pays baltes, arrimés au système russe. En revanche, les pays continentaux de l’UE, ainsi que la Suisse et les pays des Balkans, et même les trois pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) font partie de cet ensemble, appelé autrefois UCTE, et aujourd’hui ENTSO-E.
«L’échéance de 2011 a été préparée depuis plus de deux par une opération de jumelage dans le cadre des actions de l’UE destinée à favoriser l’adhésion de nouveaux membres, dans ce cas la Turquie. poursuit Dominique Maillard. La coopération a porté non seulement sur la préparation technique à l’interconnexion mais aussi sur le transfert de connaissances dans le fonctionnement des marchés libéralisés de l’électricité. Car la Turquie est aussi dans un processus d’ouverture de ces marchés : installation de la concurrence, mise en place de bourses d’échanges. Nous avons une expérience et une pratique dans ces domaines".
Les opérations européennes de jumelage -créées il y a 12 ans- procèdent par appels d’offres.
RTE avait au départ bien peu d’espoir : la décision fut prise alors que la France était en plein débat parlementaire sur l’adoption d’un texte reconnaissant le génocide arménien... «Teias a fortement insisté auprès de son gouvernement pour que cette coopération puisse se faire avec RTE même si le contexte politique des relations franco-turques a pu connaître des hauts et des bas», relève M. Maillard. D’un coût –payé par Bruxelles- d’1,4 millions d’euros, le jumelage a mobilisé successivement une cinquantaine d’experts de RTE qui ont fait des missions de 3 à 5 jours.
L’interconnexion de la Turquie au réseau européen est en outre une étape importante dans la réalisation de la «boucle électrique euro-méditerranéenne». Ce projet vise à aller vers un marché intégré des deux rives de la Méditerrannée. Actuellement, il y a trois zones différentes :
- la zone du Maghreb qui est donc déjà interconnectée via l’Espagne, au système électrique de l’Europe continentale,
- un ensemble Libye-Egypte-Jordanie-Syrie-Liban, qui est en voie d’arrimage à la zone du Maghreb (peut-être avant la fin 2009)
- la Turquie qui forme donc un réseau indépendant. Son arrimage sera une étape décisive pour boucler la boucle. Rappelons qu’Israël et la Palestine forment une île électrique.
Les trois ensembles ont une caractéristique en commun : une forte croissance de la demande en électricité. La Turquie a ainsi des taux de croissance de la consommation de 8% par an contre 1 % en Europe.
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