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European Energy Review est un portail en anglais publié depuis les Pays-Bas et consacré aux questions de l'énergie. Rédacteur en chef : Karel Beckman. Correspondant à Paris : Yves de Saint Jacob.
Christophe de Margerie : non, l’âge du pétrole n’est pas fini !
mercredi 02 décembre 2009
Alors que l’approche de Copenhague renforce le discours «politiquement correct» d’un monde sans carbone, le patron de Total met en garde dans une interview à European Energy Review : «si vous arrêtez le pétrole et le gaz, vous arrêtez l’économie».
(Extraits)
L’idée que l’âge du pétrole est fini ou même que nous approchons de son terme est une idée dangereuse. Il est vrai que nous devons passer du statut d’entreprise pétrolière et gazière à celui d’entreprise énergétique dans un sens plus large. Mais nous ne faisons pas cela pour remplacer le pétrole et le gaz. Nous avons besoin de formes alternatives d’énergie, mais en plus du pétrole et du gaz. Vous ne pouvez pas remplacer le pétrole et le gaz. Si vous faites cela, vous n’aurez tout simplement pas assez d’énergie. Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent que l’on doit développer un monde sans carbone. Si vous dites que vous ne voulez pas d’émissions de CO2, alors vous devez arrêter la production de carbone. Si vous arrêtez la production de carbone, vous arrêtez l’économie !
Vous pensez que le problème du climat est exagéré ?
Non, je ne dis pas cela. Ce n’est pas notre rôle en tant que compagnie pétrolière de nous prononcer sur le changement climatique, car notre expertise, c’est la production de pétrole et de gaz. C’est notre responsabilité, et chacun doit assumer ses responsabilités.
Comme nous sommes fondamentalement une compagnie pétrolière et gazière, on pourrait penser que nous sommes hostiles aux nouvelles sources d’énergie, mais rien n’est moins vrai. Nous investissons largement dans la recherche de nouvelles énergies qui n’aient pas un impact significatif sur le cimat. En fait, c’est l’axe de notre stratégie de compléter le coeur de métier de Total avec d’autres formes de productions énergétiques, par exemple le nucléaire et le solaire. Mais comme je l’ai dit, la production d’hydrocarbures restera essentielle pourt assurer les besoins en énergie de l’humanité pendant très longtemps. La réalité est que le monde a besoin de quantités croissantes d’énergie. Aussi, quand j’entends certains s’exprimer contre les hydrocarbures et contre le nucléaire, je ne peux que dire : vous êtes contre l’avenir.
(...)
Vous dites que le production d’hydrocarbures va rester importante pendant longtemps. Mais vous avez aussi mis en garde contre les risques de “pic pétrolier” , c’est-à-dire d’un épuisement des réserves de pétrole dans le monde…
Je n’ai jamais dit que nous risquions d’épuiser nos reserves.Je ne le crois pas. Mais nous risquons d’arriver au bout de nos capacités de production.Ce n’est pas une question de réserves comme les théoriciens du pic pétrolier voudraient le faire croire, mais plutôt une question de capacités disponibles.
Pourquoi atteignons nous un pic de production ? Première raison, il y a moins de gisements pétroliers et gaziers faciles. Deuxième raison, le nationalisme pétroliér aussi bien que la crise économique aggravent les choses. Ils conduisent à moins d’investissements. Les pays producteurs se demandent aujourd’hui : «pourquoi investir maintenant», alors qu’ils manquent de cash et ont d’autres priorités. Il y a une réduction dans l’investissement car il y a un manque de disponibilités financières. Les pays producteurs n’ont pas la force financière de groupes comme Total. Cela souligne l’importance pour une société comme la nôtre de faire des profits. Notre balance financière nous aide à passer les temps difficiles et nous permet de maintenir notre programme d’investissement. Si nous n’avions pas fait ces profits, nous n’aurions pas été capables de poursuivre nos investissements comme nous le faisons aujourd’hui.
Mais en fin de compte, la crise a un impact négatif sur l’investissement. Je crains que dans quelques années, quand la reprise économique sera là, ce sera un lourd problème. Les prix vont croître à nouveau et, surtout, nous pouvons faire face à une pénurie d’energie. Nous produisons aujourd’hui 84 millions de barils par jour. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, nous aurons bientôt besoin de 100 millions de barils quotidiens. L’Arabie Saoudite peut produire 4 millions de plus. Cela nous amènerait à 88 millions. Encore bien loin du compte. Et quand vous voyez ce qui se passe en Irak, en Iran, au Venezuela, dans l’Athabasca canadien, en Russie, au Nigeria…
Les réserves sont là , mais seront elles développées à temps ? Je l’ai dit récemment à François Fillon: «soyez prudent, vous êtes face à un gros problème – pas simplement le CO2 mais aussi la croissance économique. Sans énergie, il n’y aura pas de croissance».
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Exactement. Il a tout compris. Et ce n'est pas parce que ça paraît énorme que ça n'arrivera pas.
>> Mais nous risquons d’arriver au bout de nos capacités de production.Ce n’est pas une question de réserves comme les théoriciens du pic pétrolier voudraient le faire croire, mais plutôt une question de capacités disponibles.
Comme le dit Mr de Margerie lui-même "il y a moins de gisements pétroliers et gaziers faciles". Ne serait-ce pas parce que les réserves s´epuisent pas hasard ?