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La société PETROSTRATEGIES a été créée en octobre 1985 à Paris, France. Dirigée par Pierre Terzian, elle a plusieurs types d'activités autour du secteur de l'énergie: publication d'articles et d'une lettre...
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Pétrole : le grand flou statistique


mercredi 04 février 2009

L'incertitude règne sur les marchés pétroliers. Et pour cause, on ne mesure toujours pas correctement la demande et la production mondiale d'or noir


Une analyse de Pétrostratégies, la revue de Pierre Terzian

Les décideurs du secteur de l’énergie, en particulier ceux de l’industrie pétrolière, doivent prendre en compte une série de facteurs qui changent considérablement les perspectives de la demande. Certains relèvent de la statistique. S'ils sont anciens, on en mesure mieux la gravité aujourd’hui.
Ils découlent de la déficience des outils de prévisions et d’estimations dont on dispose pour évaluer la demande de pétrole et donc prendre les bonnes décisions en matière de production et d’investissements. Cette déficience avait éclaté au grand jour lors de l’accélération de la demande mondiale de pétrole, à partir de 2003 (en particulier en Chine, aux Etats-Unis et en Inde), que personne n’avait pu prédire.

Aujourd’hui, on a l’impression que c’est la tendance à la baisse de la demande qui est sous-estimée, non seulement pour le futur immédiat (2009) mais même sur le passé récent. Ainsi, alors que les principales sources de données pétrolières évaluent à environ 2 % la baisse de la demande survenue au 4e trimestre 2008, les statistiques du Jodi (le système de collecte de données opéré par le Forum international de l’énergie - FIE), qui nous parviennent au fur et à mesure, suggèrent que le recul a été plus important. Selon les chiffres communiqués au FIE par 60 pays représentant 73 % de la consommation mondiale, la demande de pétrole a diminué de près de 6 % en moyenne en octobre et en novembre 2008 par rapport aux mois correspondants de 2007. Transposé à l’échelle mondiale, cela équivaut à une chute de plus de 5 millions de b/j de la demande, soit deux fois plus que les 2 millions de b/j retenus par les autres sources. Qui a raison ? Il faudra plusieurs mois pour le savoir.

Mêmes imperfections du côté des chiffres relatifs à la production réalisée de pétrole. Ainsi, alors que les sources les plus respectées (dont les outils sont connus : tanker tracking, collecte directe de données et estimations) pensent que la production de pétrole est restée quasi inchangée à environ 86 millions de b/j en novembre 2008 par rapport à novembre 2007, 48 pays représentant 65 % de la production mondiale de pétrole ont indiqué au FIE que leur production a diminué de 0,9 %, ce qui équivaut à un écart d’environ 800 000 b/j (transposition mondiale). En somme, la situation des fondamentaux était sensiblement différente de celle que les ministres de l’OPEP imaginaient, lorsqu’ils se sont réunis le 17 décembre dernier à Oran.
 
Les incertitudes sont encore plus gênantes quand elles concernent les prévisions de la demande de pétrole pour le proche avenir. On sait que les modèles de prévisions font une très large part au lien entre activité économique et demande pétrolière, alors que ce lien a été considérablement distendu en un quart de siècle. A cette faiblesse des modèles s’ajoute le fait que la prévision de l’activité économique, déjà difficile en temps normal, est rendue extrêmement aléatoire en temps de crise. Ainsi, dans son dernier rapport mensuel, l’AIE avoue avoir été obligée « d’anticiper sur les révisions institutionnelles à venir» en matière de croissance économique mondiale prévue pour 2009 et opté, de son propre chef, pour un taux de 1,2 %, comparé aux 2,1 % du FMI que celui-ci révisera « probablement » à la baisse prochainement… Ce faisant l’AIE rejoint le secrétariat de l’OPEP qui avait déjà opté pour un taux de 1,3 %. Mais le problème fondamental posé par la nécessité de réexaminer les modèles de prévision demeure et il va sans doute être aggravé dans les années à venir, avec la mise en vigueur des mesures envisagées dans les grands pays industrialisés (et ailleurs) pour agir sur le couple énergie-climat.


Photo copyright Nikkytok - Fotolia.com
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