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 - Professeur à l'ESG Management School

Auteur
François LAFARGUE est professeur à l'ESG Management School.

Afrique du Sud : charbon ou gaz de schiste ?


lundi 10 juin 2013

L'économie de Afrique du sud repose essentiellement sur le charbon. Le gaz de schiste serait une solution... si le problème de l'eau n'était pas aussi aigu.


Voir le site RiskEnergy

La production d'énergie primaire en Afrique du Sud repose essentiellement sur le charbon (à la hauteur de 67 %). L'Afrique du Sud détient les 9e réserves mondiales de charbon (et 95 % de celles de l'Afrique) et se classe au 5e rang mondial parmi les exportateurs mondiaux.

 Alstom a fourni les équipements nécessaires au fonctionnement de la plupart des centrales à charbon du pays (80 % de l'électricité du pays est produite grâce aux turbines installées par ce groupe) et est engagé dans la construction de deux nouvelles centrales, à Kusile (une ville située à 100 km au nord-est de Johannesburg) et à Medupi (dans la province du Limpopo).

Depuis 1994, l'année des premières élections libres qui ont permis le retour du pays sur la scène internationale, la consommation d'électricité a augmenté de plus d'un tiers. Cette hausse s'explique par le dynamisme de l'industrie minière (l'Afrique du Sud est devenue l'un des premiers fournisseurs de la Chine en minerais et métaux, tels que le platine) et par la croissance économique du pays (le PIB a été multiplié par trois depuis 2000). Le pays doit aussi répondre à la demande induite par la présence des industriels étrangers, comme Rio Tinto ou Tata.

Quid du gaz de schiste ?

Les réserves en gaz de schiste de l'Afrique du Sud sont jugées prometteuses, puisque selon les données de l'EIA (ministère américain de l'Énergie), elles se situeraient au 5e rang mondial (7,5 % des réserves mondiales). En septembre 2012, le gouvernement de Jacob Zuma a levé le moratoire décrété un an plus tôt concernant l'extraction de gaz de schiste.

Les motivations du gouvernement sud-africain sont multiples :

- assurer la création de nouveaux emplois dans un pays où le taux de chômage est, selon toute vraisemblance, de l'ordre de 40 %, et alors que la contestation sociale est de plus en plus violente. Même si l'exploitation du gaz non conventionnel peut se révéler décevante et peu rentable à moyen terme, la création d'emplois même temporaires ne peut qu'être utile au président Zuma dans la perspective des prochaines élections législatives du printemps 2014.

- réduire l'utilisation du charbon sur le marché intérieur et privilégier les exportations de ce minerai vers la Chine et l'Inde.

- depuis 1998, le prix du kW/h pour les industriels a été multiplié par près de six, du fait de la hausse du cours du charbon, ainsi que du financement la modernisation du réseau électrique. Le gaz de schiste offrira une électricité plus compétitive à l'industrie sud-africaine dont la productivité reste médiocre par rapport à celle de ses concurrents, notamment l'Australie.

Problèmes d'eau

Mais la mise en valeur des gisements de gaz de schiste se heurte non seulement à l'opposition d'une partie de l'opinion publique, mais également à la rareté des ressources hydriques. Les nappes phréatiques sont peu abondantes dans le pays et la pluviométrie annuelle moyenne est faible. Seules les régions du Natal et du Drakensberg sont correctement arrosées. En Afrique australe, l'Afrique du Sud est avec le Malawi et la Namibie, le pays dont les ressources en eaux renouvelables par habitant sont les plus maigres.

L'exploitation des gisements de gaz non conventionnels ne se présente pas favorablement puisqu'ils sont situés dans la région semi-désertique du Karoo. Enfin, il est paradoxal que l'Afrique du Sud gaspille ses ressources hydriques dans la fracturation des roches de schistes, alors même qu'elle est engagée dans un coûteux et controversé projet de construction de barrage au Lesotho (Highland water project), afin de disposer de ressources hydrauliques plus régulières.

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1 commentaire(s)
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Commentaire par papijo
lundi 10 juin 2013 16:05
Article intéressant, mais je ne partage pas la conclusion concernant l'impact sur l'eau. Tout d'abord, il faut remarquer que la technique du fracking s'est développée aux USA dans des régions dont l'aridité n'est sans doute pas très éloignée de celle de l'Afrique du Sud. Ensuite, il ne faut pas s'arrêter à la production du combustible, mais considérer également son utilisation finale. Si on veut produire 1 MWh d'électricité, le rendement d'une centrale à gaz à cycle combiné est supérieur à 50%. On devra donc évaporer (dans les tours de refroidissement) une quantité d'eau correspondant aux pertes, soit 1 MWh. Par contre, si on produit ce MWh d'électricité avec une centrale à charbon, le rendement tombe à environ 33%, la quantité d'eau à évaporer correspond donc à 2 MWh, soit le double de la centrale à gaz de schistes. Si je ne me suis pas trompé dans mes calculs, je trouve qu'un forage de gaz de schistes produisant 4 giga-pieds cubes, soit environ 400 GWh permet d'économiser 250 000 m3 d'eau par rapport à une centrale à charbon. Alors, les 15 000 m3 consommés sur le site du forage sont "bien investis" ! NB: Merci de vérifier mes calculs. Je n'aime pas trop les unités US !
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