Par Brice Emonet
- Conseil en Management et Organisation
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Brice Emonet est Manager dans le secteur Energie & Utilities au sein du cabinet de conseil Magellan Consulting. Il dispose de plus de 5 ans d'expérience dans les secteurs gaziers,...
Berlusconi relance l'atome
Par Brice Emonet
- Conseil en Management et Organisation
mercredi 17 février 2010
Après plus de 20 ans sans recours à l’énergie nucléaire, le gouvernement italien vient d'adopter un décret entérinant la relance officielle de l’énergie atomique au sein du pays.
On peut s’interroger sur les raisons d’un tel revirement. En effet, suite à la catastrophe de Tchernobyl en 1986, il fut décidé un an plus tard par la voie du référendum de cesser toute activité nucléaire pour la production d’électricité. Les actes n’ont pas tardé : entre 1987 et 1990 les quatre seuls réacteurs que comptaient l’Italie ont été arrêtés. S’en est suivi le vote d’un moratoire interdisant toute nouvelle construction.
Cette décision aussi soudaine contrastait avec d’une part, la sûreté des centrales existantes qui ne présentaient pas un risque particulier de sécurité mais surtout par l’absence d’une stratégie énergétique claire de substitution.
Le résultat est que 70% de l’électricité produite en Italie est d’origine thermique(1), c'est-à-dire avec une forte emprunte carbone. Sans oublier les engagements de l’Italie dans la lutte contre le réchauffement climatique, qui passe par une réduction stricte des GES(2), notamment dans l’industrie de l’Energie, forte émettrice de CO2.
De plus l’Italie est aujourd’hui un importateur net d’énergie, qui consomme environ 6 fois plus(3) qu’il ne produit. Elle importe 17% de l’électricité qu’elle consomme via la Suisse mais surtout la France qui mise de son côté majoritairement sur l’atome pour sa production électrique.
Les effets sur les tarifs de l’électricité placent l’Italie dans le top 10 des pays où cette énergie est la moins bon marché.
Autant de raisons qui ont poussé le gouvernement actuel à remettre en question la position de la péninsule sur ce dossier :
- L’atteinte des objectifs de réduction de 20% des GES d’ici 2020
- Diminuer la dépendance énergétique de la péninsule
- Diminuer l’impact du coût de l’électricité dans le portefeuille des ménages
Même si l’Italie n’exploite plus de centrales sur son territoire, elle n’a pas totalement arrêté les activités dans ce domaine. En effet ENEL s’est allié à EDF pour la construction de 4 EPR. Cela dit, le gouvernement n’exclut pas de faire appel aux technologies américaines ou japonaises.
Promesse électorale ou pas, cette décision est loin de faire l’unanimité, dans le sens ou plus de un italien sur deux est défavorable à l’implantation d’un site nucléaire dans sa région(4).
Les élus locaux et régionaux, même au sein de la majorité au pouvoir, y vont également de leur opposition malgré les dispositifs de compensations économiques prévus dans les zones prêtes à accueillir les nouvelles installations.
Même si la réalité économique et énergétique du pays tend à justifier ce plan d’action, la partie n’est pas encore jouée. Il reste de nombreux points à clarifier pour rassurer les citoyens italiens.
La transparence doit être de mise et le gouvernement doit être clair dans ses orientations et ses choix. La consultation et la pédagogie doivent faire partie intégrante du débat.
Notes
(1) A titre de comparaison, plus de 75% de l’électricité produite en France est d’origine nucléaire (source : Agence Internationale de l’Energie)
(2) GES : Gaz à Effet de Serre
(3) Source : Agence Internationale de l’Energie
(4) Sondage Demopolis
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