Par Pierre Mulin
- Co-fondateur de la société Objectif Carbone
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Co-fondateur de la société Objectif Carbone, Pierre Mulin se consacre depuis début 2007 aux missions destinées à lutter contre le changement climatique. Maitrise de l'énergie, Bilan carbone,...
Chauffage électrique, mode d'emploi
Par Pierre Mulin
- Co-fondateur de la société Objectif Carbone
mardi 08 décembre 2009
Chauffage électrique = émissions de CO2. C'est en tout cas l'équation que Pierre Mulin propose à Rémy Prud'homme, pour conclure un débat sur le chauffage électrique engagé depuis deux semaines.
Rémy Prud'homme persiste dans ses affirmations mais indique qu’il est prêt à revoir sa position si les arguments présentés sont pertinents. J’assume donc le fait de n’avoir pas su expliquer clairement. J’avais utilisé quelques raccourcis. C’était pour essayer de faire apparaître un raisonnement simple :
-on consomme plus d’électricité l’hiver
-les centrales thermiques à flammes sont plus sollicitées l’hiver
-le kWh électrique est plus « carboné » que le kWh moyen
Ce n’est pas une croyance, mais un fait établi. Le fait que M. Rémy Prud'homme aboutisse a un résultat différent est du à une erreur de raisonnement : il se focalise sur les heures de pointes et n’effectue pas d’attribution différenciée en fonction de l’usage.
Je rappelle que les gens se chauffent lorsqu’il fait froid, et pas aux heures de pointes.
D’ailleurs (pour ceux qui en doute), voici un graphe qui le formalise. Chaque point correspond à l’électricité consommée en France pour une journée. Plus le point est haut, plus il y a eu d’électricité consommée. Les points sont disposés en fonction de la température du jour (moyenne entre température mini et maxi)
Je laisse le lecteur deviner pourquoi on consomme d’autant plus d’électricité qu’il fait froid. Pour répondre à la question du contenu CO2 du kWh destiné au chauffage électrique, il faut et il suffit de regarder le contenu CO2 des kWh mis sur le réseau « en sus » de 1,2 TWh par jour.
Cette quantité est en fait assez facile à isoler et il y a (of course) une excellente corrélation entre la quantité d’électricité consommée dans la journée et le complément par mode (valeur produite au delà du minimum annuel de production). C’est la quantité de CO2 présente dans cette partie de électricité qu’il faut prendre en compte pour le chauffage.
Et surprise, la part d’énergie fossile dans ce complément d’énergie bien nettement supérieure à celle « de base ». CQFD. Le lecteur assidu reconstruira lui même le résultat à partir des données.
Note :
- Celui qui veut faire
plus simple remarquera qu’en 2008, les centrales thermiques à
flammes ont contribuées aux apports quotidiens pour des
valeurs comprises entre 3 000 MWh et 135 000 MWh. Si l’on
se concentre sur les contributions les plus fortes, par exemple au
delà de 100 000 MWh, c’est arrivé à 93
reprises, dont 98% dans la saison de chauffe. Ce n’est
probablement pas une coïncidence.
- Pour ce qui est des
facteurs d’émissions que j’avais utilisés pour
obtenir un résultat chiffré, ils provenaient d’EDF
comme je l’indiquais. J’avais bien évidemment pris le
soin de réviser le parc français des centrales
thermiques à flamme d’EDF
- centrales au
charbon : 9 unités de 250 MW et 4 de 600 MW
- centrales au fioul
: 4 unités de 700 MW, 4 de 600 MW et 3 de 250 MW
- centrale au gaz de
hauts fourneaux : 1 unité de 120 MW
- turbines à
combustion : 1 de 215 MW, 2 de 185 MW, 3 de 125 MW, 4 de 86 MW
- centrales au
charbon : 9 unités de 250 MW et 4 de 600 MW
[Réponse de l'auteur]
Difficile de répondre simplement. Le fait est que c'est déjà aujourd'hui principalement de l'électricité nucléaire qui alimente le chauffage électrique. Mais l'image de ce qui est vrai pour le parc de chauffage électrique actuel ne peut pas être utilisée pour les nouveaux moyens de chauffages électriques. La priorité est d'isoler pour se passer de chauffage (hors période de grand froid). L'électricité peu carbonée doit être utilisée pour d'autres usages tant qu'elle n'est pas disponible 'à volonté', c'est à dire pour encore longtemps.
[Réponse de l'auteur]
Ce n'est malheureusement pas si simple. Le besoin en énergie d'un système de chauffage dépend en premier lieu de la différence entre : - température souhaitée (qui est effectivement plus importante lorsque l'on est présent et réveillé) - température extérieure (qui est plus faible la nuit) Dans la pratique, si vous mesurez la consommation d'énergie de votre système de chauffage à "l'heure de pointe", cela représentera moins de 10% de la consommation totale. Il n'est donc pas pertinent de déduire une généralité en regardant le fonctionnement à ce moment précis. Bien cordialement Pierre Mulin