- Directeur-général de SIA-Conseil
Auteur
Matthieu Courtecuisse est Directeur-général de SIA-Conseil.
Tribune : la diplomatie énergétique, l'atout maître du quinquennat
- Directeur-général de SIA-Conseil
lundi 11 février 2008
La France dispose de leaders industriels mondiaux dans tous les secteurs de l'énergie. Une opportunité unique de développer une "diplomatie énergétique", estime Matthieu Courtecuisse, dans une tribune publiée dans Débat&Co.
Chacun peut le constater au quotidien : les fortes tensions sur l’approvisionnement en énergie et la contrainte carbone sont en train de bouleverser les cartes du jeu diplomatique mondial. La France, plus que d’autres, peut en tirer avantage ; en capitalisant sur une doctrine énergétique rénovée et en opérant un effet de levier sur la base industrielle française, le président Sarkozy dispose d’une opportunité unique de doter la France d’un statut spécifique parmi les puissances moyennes et au passage de légitimer dans la durée la place de la France en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU.
Le renouveau du nucléaire, la suprématie à venir du charbon, l’essor du Gaz Nucléaire Liquéfié (GNL) sont autant de défis nouveaux sur le plan industriel, écologique et géostratégique. La France dispose en matière énergétique d’une position unique avec des leaders mondiaux dans presque tous les compartiments du secteur : les métiers de l’amont (gaz / GNL, pétrole, uranium, parc de centrales nucléaires), le ''trading'' de ''commodities'' et de carbone, les métiers de l’aval (électricité & gaz, raffineries, pétrochimie, gaz industriels), ou encore les équipementiers (centrales, transmission, gestion de la demande d’énergie).
Cette position industrielle globale ne doit pour autant pas faire oublier le besoin d’investir de façon plus nette dans la R&D (les biocarburants de seconde génération, les ''CleanTechs'', le charbon propre), de prendre des positions plus fortes sur les mines de charbon et également de conduire les nécessaires rapprochements entre acteurs industriels, au risque de ne pas atteindre la taille critique requise. En particulier, dans cette course globale au leadership technique et scientifique, l’absence d’évolution, d’investissement et même de révision des cursus universitaires pourraient à terme compromettre la place avantageuse qu’occupe aujourd’hui la France dans le monde de l’énergie faiblement carbonée.
Sur un plan plus strictement politique, il est évident que l’exécutif français dispose d’une arme diplomatique unique et inédite dans l’histoire contemporaine récente. Qu’il s’agisse de la relance du projet européen, de l’initialisation du projet d’Union euroméditerranée ou encore des négociations sur le post Kyoto 2012, l’énergie joue un rôle central dans la construction et le renforcement des collaborations multilatérales. En même temps, par la force de la position française sur ce secteur, cette nouvelle donne complique certaines de nos relations bilatérales, soit par des stratégies divergentes comme avec l’Allemagne dont le manque de vision en matière énergétique est particulièrement incompréhensible, soit par des nouveaux phénomènes de concurrence comme avec la Russie dans la course à la signature des accords de coopération en matière de nucléaire civil.
En outre, la diversification des thèmes de l’énergie, leur complexité et leur enchevêtrement alourdissent nettement le rôle des entreprises dans ce jeu diplomatique, au détriment du Quai d’Orsay. Il existe là aussi un défi pour l’exécutif français, que ce soit pour gérer les rivalités potentielles entre acteurs industriels français et aussi pour piloter les jeux de compensation qui fonctionnent parfois comme des vases communicants entre acteurs, et dans lesquels les médias, bombardés de chiffres de contrats, multiplient les contre-sens d’analyse.
A l’évidence, selon moi, la diplomatie énergétique constitue le plus grand succès du président depuis son arrivée au pouvoir. En se projetant dans l’avenir, celle-ci pourrait même devenir l’atout maître du quinquennat répondant ainsi à deux objectifs clés de sa campagne : le retour de la France en Europe et dans le monde et la revalorisation des filières industrielles et de la recherche françaises.
Matthieu Courtecuisse, 34 ans, est fondateur et directeur général de Sia Conseil, cabinet indépendant de conseil en management et en stratégie opérationnelle de 160 consultants, fondé en 1999 et présent en Europe (Belgique, France, Italie, Suisse) et au Maghreb.
Débat&Co est le site débat de l'Institut de l'Entreprise
Le renouveau du nucléaire, la suprématie à venir du charbon, l’essor du Gaz Nucléaire Liquéfié (GNL) sont autant de défis nouveaux sur le plan industriel, écologique et géostratégique. La France dispose en matière énergétique d’une position unique avec des leaders mondiaux dans presque tous les compartiments du secteur : les métiers de l’amont (gaz / GNL, pétrole, uranium, parc de centrales nucléaires), le ''trading'' de ''commodities'' et de carbone, les métiers de l’aval (électricité & gaz, raffineries, pétrochimie, gaz industriels), ou encore les équipementiers (centrales, transmission, gestion de la demande d’énergie).
Cette position industrielle globale ne doit pour autant pas faire oublier le besoin d’investir de façon plus nette dans la R&D (les biocarburants de seconde génération, les ''CleanTechs'', le charbon propre), de prendre des positions plus fortes sur les mines de charbon et également de conduire les nécessaires rapprochements entre acteurs industriels, au risque de ne pas atteindre la taille critique requise. En particulier, dans cette course globale au leadership technique et scientifique, l’absence d’évolution, d’investissement et même de révision des cursus universitaires pourraient à terme compromettre la place avantageuse qu’occupe aujourd’hui la France dans le monde de l’énergie faiblement carbonée.
Sur un plan plus strictement politique, il est évident que l’exécutif français dispose d’une arme diplomatique unique et inédite dans l’histoire contemporaine récente. Qu’il s’agisse de la relance du projet européen, de l’initialisation du projet d’Union euroméditerranée ou encore des négociations sur le post Kyoto 2012, l’énergie joue un rôle central dans la construction et le renforcement des collaborations multilatérales. En même temps, par la force de la position française sur ce secteur, cette nouvelle donne complique certaines de nos relations bilatérales, soit par des stratégies divergentes comme avec l’Allemagne dont le manque de vision en matière énergétique est particulièrement incompréhensible, soit par des nouveaux phénomènes de concurrence comme avec la Russie dans la course à la signature des accords de coopération en matière de nucléaire civil.
En outre, la diversification des thèmes de l’énergie, leur complexité et leur enchevêtrement alourdissent nettement le rôle des entreprises dans ce jeu diplomatique, au détriment du Quai d’Orsay. Il existe là aussi un défi pour l’exécutif français, que ce soit pour gérer les rivalités potentielles entre acteurs industriels français et aussi pour piloter les jeux de compensation qui fonctionnent parfois comme des vases communicants entre acteurs, et dans lesquels les médias, bombardés de chiffres de contrats, multiplient les contre-sens d’analyse.
A l’évidence, selon moi, la diplomatie énergétique constitue le plus grand succès du président depuis son arrivée au pouvoir. En se projetant dans l’avenir, celle-ci pourrait même devenir l’atout maître du quinquennat répondant ainsi à deux objectifs clés de sa campagne : le retour de la France en Europe et dans le monde et la revalorisation des filières industrielles et de la recherche françaises.
Matthieu Courtecuisse, 34 ans, est fondateur et directeur général de Sia Conseil, cabinet indépendant de conseil en management et en stratégie opérationnelle de 160 consultants, fondé en 1999 et présent en Europe (Belgique, France, Italie, Suisse) et au Maghreb.
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