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Par IRIS


Copenhague J-18 : blocage en vue


mercredi 18 novembre 2009

La Chine tient les pays occidentaux comme "historiquement" responsables de la détérioration du climat. Washington veut bien discuter avec Pékin mais cherche à éviter une opposition nord-sud. La situation parait aujourd'hui totalement bloquée


La conférence de Copenhague est dans 18 jours, voir le décompte sur le site officiel.

Ainsi que le montre le graphique ci-contre, Chine et Etats-Unis sont devenus deux partenaires égaux ...dans l'émission de CO2.
Certains proches du président Barack Obama disent même rechercher une sorte de "G2 sur le climat". Ils veulent parler directement avec la Chine pour qu'elle ne devienne pas le porte-drapeau des pays en développement. Pékin de son côté a déjà dit qu'il ne fera rien si Washington ne s'engagent pas. Deux "grands" s'observent, avec l'Europe en toile de fond.
Pour l'RIS (Institut des relations internationales et stratégiques), qui confectionne un important dossier sur Copenhague, Sarah Lacarrière et Pim Verschuuren analysent les positions réciproques des Etats-Unis et de la Chine.

WASHINGTON SE MEFIE DU CADRE ONUSIEN. (Voir le papier intégral de Sarah Lacarrière, chargée de recherche à l’IRIS)

(...) Les résistances internes auxquelles la nouvelle administration fait face n’expliquent pas à elles seules les prévisions pessimistes quant à la position américaine à Copenhague. Dans la lignée de la tradition de politique étrangère américaine, le cadre des Nations unies n’est pas appréhendé comme le plus à même de produire des résultats concrets. De plus, les Etats-Unis rejettent tout compromis sur le principe d’une autorité supranationale susceptible de leur infliger des sanctions ou rappels à l’ordre : cela fait partie de ce qui a prévalu à leur retrait du protocole de Kyoto et c’est ce qui laisse penser qu’il n’y aura pas d’accord juridique contraignant à Copenhague. Pour les Américains, la contrainte de l’engagement doit s’exercer au niveau national.
Par ailleurs, dans sa stratégie internationale, la nouvelle administration privilégie une approche concertée dans des forums multilatéraux ou des cadres bilatéraux plus étroits qu’ils considèrent plus propices à des engagements fermes et des négociations productives. Et pour cause, la négociation onusienne inclut le bloc des pays en développement peu propices au compromis avec les Américains sur les enjeux du climat. Les cadres plus restreints permettent de négocier plus facilement. Le Forum des économies majeures a été institué par les Américains, et regroupe dix-sept des plus grands pays industrialisés, y compris la Chine, qui dans ce cadre est moins tributaire de son statut de porte-drapeaux des pays en développement. Avec la Chine justement, la nouvelle administration a une stratégie de main tendue sur la question climatique. Des rumeurs circulent sur des négociations secrètes entres les deux pays. Todd Stern, qui préconise depuis longtemps une sorte de « G2 sur le climat » qui serait fondé sur une étroite coopération technologique, déclarait récemment : «  nous cherchons un partenariat très robuste avec les Chinois sur le changement climatique et sur les énergies propres ».

Les Américains n’ont pas désigné le sommet de Copenhague comme un aboutissement, ce n’est qu’une étape de la négociation internationale. Mi-octobre, Todd Stern a averti : « Il est très possible qu’il n’y ait pas d’accord à Copenhague ». La visibilité de ce sommet tient à l’enjeu d’une décision à prendre à l’approche de l’expiration du protocole de Kyoto et aux espoirs soulevés par une conjoncture politique américaine plus favorable après des années Bush qui ont vu stagner le processus de négociation. Mais la nouvelle administration n’a ni intérêt ni l’intention de se précipiter. Et d’ailleurs Barack Obama n’a pas encore annoncé son intention de se rendre à Copenhague. Quoi qu’il en soit, les Américains privilégient une approche pragmatique de régulation domestique et de coopération internationale ciblée. C’est la raison pour laquelle Copenhague ne devrait pas être « le grand soir ».


PEKIN ESTIME QUE LE "NORD" DOIT S'ENGAGER (voir l'article intégral de Pim Verschuuren, assistant de recherche à l’IRIS)

Face aux critiques récurrentes à l’égard de sa position de pollueur-non payeur, Pékin avance à la fois son droit au développement et les efforts entrepris dans la décarbonisation de son économie. Un des arguments forts de la Chine est de désigner les pays industrialisés comme coupables « historiques » de la dégradation environnementale et détenteurs des capacités de lutte et d’adaptation face au réchauffement climatique. A l’instar des pays en développement, la Chine entend donc rester en dehors de tout traité international contraignant (avec des obligations chiffrées de réduction d’émissions) et demande aux pays développés de financer la lutte contre le réchauffement dans le reste du monde. La Chine s’est constamment alignée sur les pays en développement (PED) afin de maintenir son statut dérogatoire dans les engagements du Protocole de Kyoto. La Chine est un des porte-paroles du Groupe des 77, qui regroupe 130 Etats non-industrialisés. Ceux-ci comptent sur le poids diplomatique de la Chine pour défendre leurs intérêts dans la géopolitique du climat.

Lors de la Conférence de Poznan (décembre 2008), Pékin a fait de l’engagement des pays industrialisés sur des objectifs de moyen terme un préalable à la décision d’objectifs mondiaux de long terme. Elle a milité pour leur assignation à des réductions d’émissions à hauteur de 25 à 40% pour 2020 par rapport à 1990. Elle sollicite également une mise à contribution unilatérale de ces mêmes pays en matière de transfert financier et technologique afin d’aider les PED à faire face aux coûts des mesures d’atténuation et d’adaptation au changement climatique (4). Elle est par ailleurs opposée à toute taxe carbone aux frontières destinée à réajuster les conditions de concurrence entre les pays développés et les PED. La proposition de législation climatique Waxman-Markey en débat au Congrès américain prévoit de taxer les importations de produits dont la fabrication est hautement émettrice de carbone. Pékin est fortement opposée à ces taxations et renie sa responsabilité dans les rejets de gaz à effet de serre. La délégation chinoise dans les négociations sur le climat a proposé en mars 2009 de comptabiliser les émissions de carbone selon les lieux de consommation des produits et non selon leurs lieux de production (5). Ceci serait largement bénéfique à la Chine dont un tiers de la production industrielle est voué à l’export. Mais les pays développés s’opposent radicalement à une telle redéfinition des modes de calculs des émissions.

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