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Jacques Gindre (Mulliez) : une démarche responsable dans le vêtement professionnel


dimanche 15 juillet 2007

Société traditionnelle de confection de vêtements professionnels, près de Cholet, Mulliez s’est engagé dans la production «responsable» sous l’impulsion de ses grands clients. La collaboration avec une ONG, le choix de ses fabricants en Asie ou au Maghreb, le recours régulier à des étudiants de l'Institut Colbert, une grande mobilisation en interne ont marqué la démarche originale de cette entreprise du Maine-et-Loire.


default text Jacques Gindre, vous êtes PDG de cette entreprise très ancienne de la région de Cholet, créée en 1824, qui emploie 160 salariés au Longeron, avec un chiffre d’affaires de 36 millions d’euros, et une filiale en Espagne (27 personnes, 4 millions d’euros de ca). Vous fabriquez des vêtements pour les métiers de la santé (chirurgiens, infirmières, etc..) et pour les métiers de services (hôtesses de l’air, serveurs de chaînes de restaurants ou garages). Vous innovez souvent : après des vêtements anti-moustiques pour l’armée, ou des gants qui résistent aux coupures à l’arme blanche pour les services de sécurité, vous venez d’étudier des vêtements avec des fibres alternatives à base de bambou ou de chitine de crustacés …  Quelle est le sens de votre démarche ?

Pour la deuxième année consécutive, nous avons fait appel à des étudiants pour produire une collection en fibres alternatives. Un groupe de six jeunes filles de l’Institut Colbert (dépendant du Conservatoire des Arts et métiers de Cholet), sous la conduite d’un tuteur de l’entreprise, ont étudié parmi les fibres alternatives existantes celles qui peuvent entrer dans la fabrication d’un vêtement de travail. Ont ainsi été retenus, à côté  de chanvre, un mélange de coton bio, de viscose de bambou, de Len Pur (déchets d’élagage de  pins) et de Crabyon, obtenu à partir de la carapace de crabes. 
Avec elles, nous avons fait des tests techniques et des tests de lavage. Quand ces tests seront finis, nous utiliserons le résultat de leur travail.

C’est la deuxième fois que nous adoptons cette démarche en dehors des sentiers battus.
L’année dernière, un autre groupe d’étudiants avait travaillé sur la fabrication de tee-shirts en coton dit PET (polyéthylène téréphtalate), c’est-à-dire dérivé du produit de broyage des bouteilles en plastique. Nous ne sommes pas encore au bout du travail, mais il s'agissait de donner un sens à la réutilisation des bouteilles plastiques.

Quelles autres actions conduisez vous en matière de production responsable ?
 
Il y a deux ans, nous avons engagé un programme avec l’ONG Yamana, pour assurer une  transparence absolue et le respect des normes environnementales, sociales, et sociétales de tous nos processus de fabrication. Respect des contraintes environnementales pour les colorants et tous les composants de nos produits. Respect des normes de l’OIT pour le travail de nos fabricants en Asie et au Maghreb (travail des enfants, amplitude des horaires, salaires minima,  formation, santé). Et en interne dans l’entreprise, tri des déchets, recours aux énergies renouvelables, introduction dans les arbitrages d’achats des notions d’énergie et de transport. Même si le produit est moins cher à tel endroit du monde, on se pose la question de savoir s’il est logique de faire deux fois le tour de la planète.
Yamana, qui a engagé son action avec les tapis d’Afghanistan, a le mérite de prendre en compte toute la filière, du filateur au tisseur, du teinturier au confectionneur que nous sommes et au client final.

Pourquoi vous êtes vous engagé dans ce type de démarche ?

Le point de départ est que je sentais émerger une demande en ce sens. La demande est d’abord venue des clients liés à l’Etat, les administrations, la Marine nationale, la Ratp, qui ont déclenché les premiers des audits sociaux dans les ateliers travaillant pour eux. Ensuite, des grands groupes comme Accor ou Sodexho ont mis ces exigences dans leurs cahiers des charges. Il y a des clients qui ne passent pas encore à l’acte, mais tôt ou tard on ne pourra plus s’en passer.

J’étais un des seuls à rester un industriel intégré, capable de maîtriser mes processus de fabrication en Asie ou au Maghreb. Cette maîtrise m’apportait de facto de l’éthique. J’ai compris que j’avais une partie à jouer. Et j’ai découvert la mobilisation en interne suscitée par cette démarche, qui a développé une énergie incroyable. Tout le monde s’est mis dessus , a compris ce qu’on voulait.

Les matières « responsables » coûtent-elles plus cher ?

Cela augmente le prix, mais c’est marginal. Car dans le vêtement professionnel, le coût du produit lui-même est généralement 15 à 20 % du contrat, le reste étant de l’entretien, de la maintenance, du lavage. Par exemple, si le donneur d’ordre est Renault pour ses garages et concessionnaires, nous vendons la gamme aux blanchisseurs qui font de leur côté des contrats avec les garages. L’amortissement du vêtement ne rentre que pour 15 à 20%.
Donc s’il y a une augmentation de 10-15% due aux exigences environnementales, elle se calcule sur 15%. Cela reste marginal.

Propos recueillis par Yves de Saint Jacob

Le site de Mulliez
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