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 - Professeur honoraire au CNAM

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Professeur au Conservatoire national des Arts et Métiers, Jacques Foos a tenu la chaire de "rayonnements, isotopes et applications", de 1983 à 2008, formant ainsi plusieurs centaines d'ingénieurs...

Tsunami et Fukushima : état des lieux des pollutions


mercredi 23 avril 2014

Tsunami puis accident de Fukushima : les impacts sur l'environnement de la planète (hors Japon) ont été multiples, mais la hiérarchie des menaces révèle des surprises.


Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9 a ébranlé le Japon et donné naissance à un tsunami dévastateur qui a entrainé 18.500 personnes dans la mort et a été la cause des accidents de la centrale nucléaire de Fukushima.

Pour l'opinion mondiale, l'impact le plus redouté hors des frontières du Japon a été la pollution radioactive, avec des rejets dans l'atmosphère et dans l'océan. En oubliant d'autres pollutions, qui menacent toujours...

Les rejets radioactifs atmosphériques - Ils n'ont eu aucune conséquence, aucun effet sur la population du globe, hors la région nipponne concernée par les accidents. Bien sûr, le passage du panache de ces rejets a été détecté partout sur la planète mais simplement parce que la détection de la radioactivité est très sensible ; elle se fait au niveau de l'atome par des méthodes d'analyse nucléaire alors que la détection de n'importe quelle trace de matière non radioactive ne peut se faire que par des méthodes chimiques. Il faut alors là des milliards, voire milliers de milliards d'atomes.

Les rejets radioactifs dans le milieu marin - Ils vont se faire sentir durant une dizaine d'années dans les océans. Il faut toutefois relativiser : la quantité totale de radioactivité rejetée dans l'océan pacifique correspond à la valeur de la radioactivité naturelle contenue dans un cube d'eau de mer de 10 km d'arête. Comme le volume d'eau de l'océan Pacifique est de 166 242 000 km3, on voit que la radioactivité ajoutée est égale à 0,0006 % à celle, déjà présente à l'état naturel. Bien sûr, cet apport ne va pas être homogène pour tout le volume d'eau du Pacifique, mais les courants au large du Japon permettent une très grande dilution des eaux radioactives. La part extrêmement faible de cet ajout permet de penser que la contamination sera très faible voire négligeable. Selon les Américains, les premières traces de pollution radioactive devraient arriver cette année aux États-Unis. Mais pour l'instant, aucune "contamination" radioactive n'a été détectée à l'approche des côtes des USA. Les scientifiques canadiens ont déjà relevé des valeurs de radioactivité mais celles-ci sont bien inférieures aux seuils préconisés et ne constituent pas de danger pour la santé humaine.  Quant aux poissons, même si le thon rouge du Pacifique, qui traverse l'océan jusque sur la côte américaine, absorbe  des radionucléides dans la région de Fukushima, il les rejette par la suite durant son long voyage. Ainsi les poissons pêchés dans l'Est du Pacifique présentent des doses insignifiantes de césium radioactif, souvent 1 000 fois inférieures aux doses de polonium-210, un élément chimique et radioactif présent naturellement dans l'océan.

La radioactivité dont on parle beaucoup cache sans doute une pollution bien plus importante et bien plus grave : celle des débris divers balayés puis entrainés dans le Pacifique par le tsunami, qui devraient arriver sur la côte américaine à la fin de l'année. Le raz de marée, en pénétrant jusqu'à 10 km à l'intérieur des terres, a tout balayé sur une surface de 560 km2. Sur les 5 millions de tonnes de débris arrachés, on estime que près des trois-quarts ont coulé. Reste donc 1,5 million de tonnes de déchets flottant dans l'océan Pacifique (véhicules divers, pontons, maisons, voire bateaux). C'est une énorme masse flottante de 700 000 km2  (plus que la surface de la France). Certains appellent déjà cet immense amas de débris « le 51e État des États-Unis » ! Une animation vidéo en illustre l'ampleur.

C'est une menace pour la biodiversité marine américaine. Selon un article publié par le site "Terra Eco"  « on a dénombré quantité de passagers clandestins : oursins, étoiles de mer, anémones, crabes, moules, huîtres, palourdes, algues, etc. Au total, ce sont plus de 90 organismes marins dont bon nombre sont spécifiques aux eaux japonaises, qui ont recouvert les parois de ces débris ».  Certains font partie des espèces invasives et trois inquiètent les chercheurs américains : la moule bleue, l'algue brune connue sous le nom de wakamé et l'étoile de mer Asterias amurensis. Les deux dernières figurent sur la liste des cent espèces exotiques envahissantes parmi les plus néfastes au monde, liste établie en 2000 par l'Union internationale pour la conservation de la nature. L'introduction de ce type d'espèces dans un écosystème est considérée comme une cause majeure de régression de la biodiversité.

Sur le plan de l'information, la radioactivité n'est-elle pas l'arbre qui cache la forêt de la pollution ?

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