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Une politique commune de l'énergie reduirait la dépendance de l'Europe


samedi 21 avril 2012

En 15 ans, le taux de dépendance énergétique de l'UE est passé de 43% à 54%. A un moment où les Etats-Unis réduisent spectaculairement la leur. Une politique européenne serait utile, de même que dans le secteur des prix et de l'environnement.


 Le site de SIA-Conseil Energies et Environnement

La décision récente de l'Allemagne et de l'Italie de sortir du nucléaire civil prise et annoncée de manière unilatérale, sans concertation préalable ni avec l'Europe, ni avec les pays voisins nécessairement impactés - illustre l'absence patente d'une politique commune de l'énergie.

Les divers gisements de ressources naturelles, doublés de choix historiques différents, ont en effet conduit à des paysages énergétiques extrêmement variés au sein de l'Union Européenne, augmentant les difficultés de collaboration. Pourtant, les 500 millions d'Européens, soumis à une dépendance énergétique toujours croissante, et soucieux de maintenir leur pouvoir d'achat, peuvent-ils réellement se passer d'une absence de vision commune ?

L'Europe de l'Energie : une volonté historique non aboutie

L'ambition de construire une Europe de l'énergie a constitué l'acte fondateur de l'Europe. A l'issue de la seconde guerre mondiale, la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) et le traité Euratom prévoyaient de partager les ressources en charbon et les efforts de développement de l'énergie nucléaire. Ces aspirations louables n'ont pas débouché sur des résultats significatifs, notamment en raison de la prééminence des intérêts nationaux.

Et par la suite, la question de l'énergie n'a été adressée que de manière partielle, poursuivant des objectifs ponctuels sans une approche globale. La création du marché intérieur et la politique de la concurrence ont abouti à des mesures de libéralisation des marchés de l'énergie et à un renforcement des investissements de transport transfrontalier de l'énergie. La politique environnementale et la priorité donnée à l'effort de réduction des émissions de CO2 ont débouché sur la mise en place d'un marché d'échange des quotas carbone en 2005 et à la ratification du « Paquet Energie Climat » en 2008, fixant pour chacun des Etats-membres des objectifs contraignants.

On peut enfin évoquer la création en 2009 d'une Agence pour la Coopération des Régulateurs de l'Energie (ACER), le groupement privé ENTSO, les programmes R&D mis en route dans des technologies innovantes (PCRD, EIE..), ou encore la définition d'une feuille de route pour une énergie décarbonée en 2050.
(...)

Mais il reste trois défis majeurs : d'une part, assurer la sécurité d'approvisionnement et limiter la dépendance vis-à-vis des fournisseurs ; d'autre part, maintenir le prix de l'énergie à un niveau raisonnable, qui ne pénalise pas la compétitivité économique de l'Europe; et enfin, évoluer vers des modèles énergétiques plus respectueux de l'environnement.

Une dépendance préoccupante - De 1994 à 2009, le taux de dépendance énergétique de l'UE est passé de 43% à 54%. Si aucun progrès conséquent n'est fait dans la mise en œuvre d'une politique énergétique commune, l'Europe pourrait dépendre à 70% d'énergie importée d'ici 2030, selon la Commission Européenne. Cela expose de plus en plus les pays européens à deux risques majeurs : la rupture d'approvisionnement - dont la crise russo-ukrainienne du gaz de janvier 2009 a donné une inquiétante illustration - et une forte fluctuation des prix du marché mondial résultant d'une tension grandissante entre l'offre et la demande tirée par les grandes économies émergentes - la Chine et de l'Inde deviennent ainsi de sérieux concurrents dans la négociation de nouveaux contrats.


Dépendance énergétique Européenne
(Cliquer pour agrandir)


Les pays européens gagneraient à mieux collaborer dans le domaine énergétique. D'abord, un front uni européen disposerait d'un meilleur rapport de force qu'un morcellement de petits pays dans les négociations avec les grands fournisseurs de gaz et de pétrole. Cela permettrait d'éviter que la Russie ne profite des désaccords européens pour négocier des contrats bilatéraux à prix fort et aille jusqu'à mettre en péril des projets de développement de gazoduc qui permettraient à l'Europe de diversifier ses sources d'importation (projet Nabucco).

Les prix - Avoir un territoire européen globalement renforcé en capacités de stockage et d'interconnexions, dans un contexte de mix énergétiques très variés d'un pays à l'autre, permettrait une gestion plus optimale des ressources (...) qui pourrait limiter les hausses importantes de prix. D'ailleurs, la part croissante des productions intermittentes de type renouvelable crée naturellement davantage d'interdépendances transfrontalières, sans compter que la variété géographique des pays en termes d'ensoleillement, de vent, de température, et que les différences dans les habitudes culturelles, par exemple le décalage des pointes de consommation entre la France, l'Espagne et l'Allemagne, plaident également pour une gestion plus concertée à court et à long terme des ressources énergétiques.

L'environnement
- Enfin, la promotion d'un modèle énergétique décarboné, dont l'Europe s'est fait le chantre, génère des opportunités industrielles locales bienvenues dans un contexte économique difficile ; pour se positionner durablement face à la concurrence internationale qui monte déjà en puissance, par exemple dans le solaire et l'éolien, la construction de filières à l'échelle européenne paraît plus pertinente qu'au niveau national.


Des mix de production très variés entre pays
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Comment construire l'Europe de l'énergie ?


Un premier pas concret serait la formulation à l'échelle de l'Union d'un plan pluriannuel de programmation d'investissement. Ces investissements concerneraient le bouquet des moyens de production d'énergie, mais également les réseaux de transport et de distribution, ainsi que les capacités de stockage. L'étape suivante serait alors de lancer une entité opérationnelle de gestion et de surveillance qui permettrait une meilleure coordination au quotidien des flux transfrontaliers et de la gestion des stocks au niveau européen.

La constitution de filières technologiques d'excellence devra passer par une politique de R&D mieux coordonnée entre pays. Il paraît également pertinent de laisser un champ d'action à des initiatives intergouvernementales, permettant l'émergence de thèmes chers à plusieurs pays, avant de s'inscrire dans un cadre communautaire.

L'énergie est une question essentielle, touchant directement à la compétitivité de l'espace européen et le maintien de son niveau de vie. Améliorer la concertation dans ce secteur est un défi , mais pourrait fournir, à travers la formulation et la mise en œuvre d'une ambition partagée, le fondement d'un renouveau de l'Europe.
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4 commentaire(s)
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Commentaire par Hervé
samedi 21 avril 2012 22:02
Quand on voit la difficulté pour tirer une seule ligne THT entre la France ou l'Espagne... Le rejet des populaions en général contre la constructin de ces lignes... L'europe de l'électricité c'est pas pour demain...

Du Rêve... encore et toujours...
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Commentaire par un physicien
dimanche 22 avril 2012 15:04
Une politique européenne

Du Rêve... encore et toujours...
[3]
Commentaire par VO!
mardi 24 avril 2012 12:33
Et que pensez-vous d'une politique de défense commune pour réduire la dépendance des états membres de l'Union dans le nouveau contexte mondial ? Evidemment qu'il n'y a pas d'autres voies à décliner pour chaque état européen face aux nouvelles puissances planétaires ! Envolée la crise financière européenne, vous avez raison. Et l'on saisit encore un peu plus le caractère incongru des débats politique en France.
[4]
Commentaire par p
lundi 30 avril 2012 21:36
@Hervé ...

surtout de l'électricité à la française et de son utilisation, c'est pas certain que ce modèle porte nos voisins à nous imiter, ...

50% du chauffage élec européen, est localisé en France .. ! de 350°c 1000 Km, et 19°c rendu; et encore à quel prix, !
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