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La fiscalité verte : réouverture du chantier


lundi 17 septembre 2012

Après les premières annonces faites lors de la conférence environnementale, d'autres mesures importantes sur la fiscalité verte sont attendues d'ici la fin de l'année. Retour sur un dossier complexe et politiquement délicat.


Lors de la conférence environnementale des 14 et 15 septembre, le premier ministre Jean-Marc Ayrault a affirmé sa volonté d'ouvrir "sans tarder" le dossier de la fiscalité écologique.

Il a déjà annoncé l'extension et l'augmentation sensible de la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes), et cela  dès le projet de loi de Finances 2013. Le gouvernement va également baisser de 5 grammes de CO2 par kilomètre le seuil du malus automobile. Le soutien fiscal aux biocarburants cessera fin 2015.
 
Restent les sujets sensibles de la taxe sur les carburants, sur le gaz naturel ou l'introuvable a taxe carbone. Les sujets devraient être abordés d'ici la fin de l'année.

Géraldine Lapiche, consultante à Sia-Conseil, revient sur les enjeux généraux de cette fiscalité verte.

La fiscalité écologique française se base sur le principe du pollueur-payeur. Ce dernier, instauré par l'OCDE en 1972, prévoit que les frais résultant des mesures de prévention, de réduction et de lutte de la pollution soient pris en charge par le pollueur. Il s'applique à travers de nombreuses taxes (cf tableau récapitulatif),  et notamment la TGAP (Taxe Générale sur les Activités Polluantes).

Cependant, ce principe n'est pas toujours applicable au risque de mettre en danger la compétitivité de certaines industries. C'est ainsi que de nombreuses exonérations existent, souvent en faveur des plus gros pollueurs, expliquant la dissymétrie du système fiscal écologique français. En effet, certains produits fossiles et usages sont très peu taxés. C'est le cas par exemple du charbon, pourtant l'un des combustibles les plus polluants, dont plus de 92% de la consommation est exonérée de taxation (via la TICC - Taxe Intérieure sur la Consommation de Charbon).

Si la problématique est devenue globale suite aux différents engagements internationaux pris lors des conférences de Kyoto, Copenhague ou plus récemment de Durban, les moyens mis en œuvre et le poids de la fiscalité environnementale diffèrent d'un pays à l'autre.

 La fiscalité sur l'énergie rapportée au PIB varie autour de 2,6% (source Eurostat)   en Europe. La France, avec un taux de seulement 1,8 % figure parmi les plus bas tandis que les pays scandinaves, souvent cités en exemple, ont un taux de plus de 3%.

De même, la taxation implicite de l'énergie (c'est-à-dire la taxation qui comprend l'ensemble des recettes fiscales environnementales sur la consommation finale d'énergie ) est de 154€/Tep en France, contre 179€/Tep au sein de l'UE 27. La répartition des taxes révèle également de nombreuses disparités entre les pays européens : la France taxe les carburants à un taux bien plus élevé que la moyenne européenne tandis que les ménages français ne payent aucune taxe sur l'utilisation du gaz naturel (contre un impôt moyen de 18€/tCO2 en Europe).

Voici la position de la France sur ces deux échelles (cliquez ici pour agrandir):


















Comme vu précédemment, la fiscalité environnementale inclut de nombreuses mesures, cependant deux taxes ont particulièrement fait l'actualité ces derniers temps: la TICPE et la Taxe Carbone.

En route vers une TICPE (Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Pétroliers et ancienne TIPP ) flottante ?


La taxe environnementale la plus connue est certainement la TICPE, et pour cause, elle finance en grande partie le budget de l'Etat en étant la quatrième ressource fiscale : 24 milliards d'euros de recette en 2011, dont 14 milliards directement destinés à l'Etat.

Entrée en vigueur en 1986, elle est applicable sur la mise à consommation des hydrocarbures à usage de carburant ou de combustible. Plusieurs activités restent toutefois exemptées : l'aviation, le transport public, le transport routier de marchandise, l'agriculture... Dans un contexte global de hausse des prix des carburants (+ 40% en 10 ans) et de baisse du pouvoir d'achat, le principe de TICPE flottante fut au cœur des débats de la campagne présidentielle 2012.

L'objectif d'une telle mesure est d'ajuster le montant de la taxe en fonction de la fluctuation des prix des produits pétroliers afin de soulager les consommateurs. Cette idée est loin d'être nouvelle puisque elle fut mise en place de 2000 à 2002. (...) La perte nette pour l'Etat fut estimée à 1, 3 Mds € entre 2000 et 2002. En outre, ajuster le niveau d'une taxe afin de ne pas impacter les prix finaux remet en cause le principe du pollueur-payeur. En effet, comment inciter les consommateurs à modifier leur comportement vers une utilisation plus vertueuse de l'énergie sans signal prix cohérent ?

La baisse des prix, pouvant aller jusqu'à 6cts €/L, mise en place à partir du 28 aout 2012 est portée en grande partie par l'Etat via une baisse de la TICPE de 3cts €/L. Le reste de l'effort devra être porté par les distributeurs limités par l'interdiction de vendre à perte. Cette mesure devrait être temporaire et représenter une perte de 300 M€ pour l'Etat qui pourrait toutefois s'alourdir si la mesure était reconduite au-delà des 3 mois annoncés.

Taxe Carbone : un chantier à reconstruire

Incluse dans le projet de loi du Grenelle de l'Environnement, la Taxe Carbone ou contribution Climat- Energie devait être instaurée « en vue d'encourager les comportements sobres en carbone et en énergie ». Elle devait être compensée par des chèques énergie afin de préserver le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises.

Suite à une conférence d'experts, elle fut inscrite au Projet de Loi des Finances 2010 et concernait uniquement les combustibles fossiles, tout en exonérant une partie importante des usages. Alors que les études convergeaient vers un prix initial de 32€ la tonne de CO2 (puis une augmentation de 5% par an pour atteindre 100€ en 2030) afin d'atteindre les objectifs de réduction d'émission de gaz à effet de serre à horizon 2050, le gouvernement Fillon préférait retenir le prix de 17€ pour s'assurer de l'acceptabilité des consommateurs. Après plusieurs semaines de négociation et de rejet de la part des français, le projet fut finalement retoqué car jugé anticonstitutionnel (inégalité devant les charges publiques).

L'exemple des pays scandinaves et plus particulièrement de la Suède montre pourtant qu'une Taxe Carbone peut être un succès écologique. Plusieurs études ont démontré que les émissions de CO2 ont diminué de 9% entre 1991 et 2007, tandis qu'une croissance économique de 48% aurait dû voir augmenter ces émissions de 20%.. Instaurée à 27€, la tonne de CO2 est aujourd'hui taxée à 117€. Les ménages suédois portent la majorité de la taxe Carbone, les industries soumises au marché de quotas d'émissions de CO2 étant en partie exemptées. En conséquence, le chauffage urbain au fioul a presque entièrement disparu en faveur de la biomasse. Contrairement au modèle français la Taxe Carbone n'est pas redistribuée, en revanche les impôts sur le revenu ont été allégés.

La fiscalité environnementale doit être revue afin d'être cohérente avec la stratégie énergétique de la France et ses engagement internationaux tout en s'assurant de la compétitivité des entreprises nationales et du pouvoir d'achat des ménages français dans un contexte économique difficile. La conférence environnementale de septembre devrait être l'occasion d'étudier plusieurs propositions telle qu'une Taxe Carbone aux frontières de l'Union Européenne, comme évoqué par le Président de la République lors de son intervention télévisée de ce dimanche 9 septembre.


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3 commentaire(s)
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Commentaire par Michalet
lundi 17 septembre 2012 16:55
Les erreurs ont la vie dure : La taxe carbone est absurde car le CO2 n?est pas un gaz à effet de serre. Les grands pays le savent, mais certaines commissions de l?Europe persistent dans l?erreur : dommage. (Depuis 2008 j?en ai informé quelques Ambassades de grands Pays). ?Voici 5 raisons qui prouvent que le CO2 n?est pas un gaz à effet de serre: ?- Une première raison : Le CO2 est particulièrement transparent dans la bande de longueur d?onde de 2 à 18 microns, correspondant au maximum du rayonnement de la Terre. (Ce qui n?est pas le cas pour la vapeur d?eau, donc les nuages, et même l?oxygène) ?Rappel de la formule de Planck : Un corps à la température absolue T°K, a son rayonnement maximum pour la longueur d?onde en microns, de 3 000 divisé par T. Cela donne 10 microns pour la Terre à 300°K (Et 0,55 micron pour le soleil à 5 500 °K) . ?Vous pouvez trouver la courbe de transmission du CO2 sur le site :http://gershwin.ens.fr/vdaniel/Enseignement/Cours-Rayonnement/partie2/images/CO2.gif ?- Une deuxième raison : Elle consiste à utiliser la méthode K.T. = Kepner-Tregoe de résolution de problèmes. Cette méthode consiste, dans 2 situations différentes, à séparer les éléments qui sont identiques et ceux qui sont différents. ?Tous les éléments identiques sont sans influence. ?Application aux températures au matin en France : Par ciel clair au sud de la France et couvert au nord, les nuits sont plus froides au sud. ?Comme la teneur en CO2 est la même, ce dernier est sans influence.
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Commentaire par Gépé001
mardi 18 septembre 2012 07:56
Une taxe sur l'énergie doit permettre de réduire les prélèvements sur les salaires;elle entrainerait une baisse du chomage,une baisse des prix hors énergie;le prix de l'énergie augmenterait.L'énergie bon marché et le cout du travail élevé sont la cause du chomage et de l'absence de croissance.Essayez de comprendre!Ce n'est plus un problème d'écologie,mais de macroéconomie.
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Commentaire par carlino
mardi 18 septembre 2012 21:22
moi je trouve interessant de consommer moins d'énergie qu'il provienne de combustible fossiles ou du nucléaire ...les deux seront précieux pour nos enfants et petits enfants . Par contre il faut faire le ménage dans l'utilisation de la fiscalité dite verte !!! si c'est pour financer des éoliennes industrielles , trés pervers à plusieurs titres et qui dénaturent nos paysages ( non renouvelables ) , dévalorisent des cantons entiers ...alors non merci . Si c'est pour économiser de l'énergie ...isolation etc , pour aider les plus modestes d'entre nous , pour de la géothermie , échangeurs thermiques , solaire thermique ...du trés petit éolien individuel ou de quartier et le photovoltaïque sans revente à EDF ( stockage individuel ) , pour la recherche aussi ..... alors oui ça serait écologique . par contre @ Gépé001 que ces taxes servent a baisser le coût du travail !!! c'est une histoire de vase communiquant ..le pouvoir d'achat restera le même !. donc ça sert strictement a rien sauf peut être a revenir au travail à la bêche et la binette ! ... Non ....une fiscalité verte doit servir a une économie verte uniquement et réellement verte ...car les assoiffés d'argent , les déguisés en vert , les mafieux et corrupteurs de tous genres..sont bien présents !!!!
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