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Auteur
Frédéric Marillier est responsable de la campagne Énergie/nucléaire, Greenpeace France

Ce que nous cache l’industrie nucléaire


mercredi 18 mars 2009

Greenpace interpelle les pro-nucléaires : nous n’avons pas l’ombre d’une solution contre des risques majeurs de pollution et de prolifération


Frédéric Marillier est responsable de la campagne Énergie/nucléaire, Greenpeace France

Décriée, en perte de vitesse et marquée par le spectre de Tchernobyl, depuis quelques années, l’industrie nucléaire surfe sur la crise climatique pour se tenter de se refaire une santé. Communiquant avec un grand enthousiasme les faibles émissions de CO2 de ses centrales, elle sait cependant se faire discrète sur d’autres aspects bien moins reluisants de son activité, en particulier la question des déchets. En la matière, trente ans de recherches et des investissements colossaux n’ont pas abouti à grand-chose : aujourd’hui, nous n’avons pas l’ombre d’une solution contre des risques majeurs de pollution et de prolifération.

Certes, Areva retraite les deux tiers des déchets nucléaires produits par les centrales d’EDF. Elle en extrait 1 % de plutonium, soit 8 tonnes par an, qui viennent accroître les stocks détenus à La Hague (entre 70 et 80 tonnes) ou servent à fabriquer du nouveau combustible, le Mox. Ce mélange de plutonium et d’uranium naturel pose de graves problèmes de gestion à long terme – le Mox irradié étant plus radioactif et plus « chaud » que du combustible irradié classique – et de prolifération militaire – 6 à 10 kilos de plutonium suffisent pour fabriquer une bombe de la puissance d’Hiroshima.

Le prétendu recyclage s’arrête là. De ce qui reste, c’est-à-dire de l’uranium irradié (95 %) et des produits de fission (3 %), rien n’est réutilisé dans les centrales. Ces substances, comme les autres types de déchets produits par les installations nucléaires (vêtements et outils contaminés, boues de traitement, etc.), finissent purement et simplement entreposées dans différents sites.

Ainsi, le Centre de stockage de la Manche accueille 527 217 m3 de déchets de faible et moyenne activité, nocifs durant 300 ans. Fermé entre 1994 et 1999, ce centre a toujours été mis en avant comme un modèle du genre mais il présente aujourd’hui toute une série de problèmes : incertitude sur l’inventaire des matières qui y sont stockées, illégalité du stockage de substances d’origine étrangère ou encore forte pollution de l’environnement. Selon des mesures réalisées par Greenpeace en 2006, les niveaux de tritium atteignent 18 000 Bq/litre dans les nappes phréatiques situées aux environs du centre, le seuil d’alerte sanitaire préconisé par l’OMS s’élevant à 100 Bq/litre.

Gênée aux entournures, l’industrie fait miroiter les nouvelles options technologiques qui solutionneraient tous les problèmes : la fameuse quatrième génération ou la fusion, mais aussi le réacteur EPR, censé produire 15 % de résidus radioactifs en moins. Là encore, les partisans du nucléaire omettent de dire que ces déchets seront sept fois plus dangereux que ceux provenant des autres réacteurs. Le fonctionnement de l’EPR prévoit en effet que le combustible reste beaucoup plus longtemps dans le réacteur que dans les modèles actuels, ce qui implique une usure (« burn-up ») et donc une radiotoxicité bien plus importante. Ni la France, ni la Finlande, qui construisent des EPR, ni aucun des autres pays qui envisagent d’en acquérir un (Royaume-Uni, États-Unis, Inde, etc.) ne disposent d’un site adapté à des combustibles ainsi irradiés. Impuissante à résoudre la crise du climat, une relance du nucléaire renforcera celle des déchets nucléaires, héritage empoissonné aux générations futures.

Pour aller plus loin :

le «Petit mémento des déchets nucléaires » », réalisé par l'association Global Chance

Photo copyright Julien Rousset Fotolia.com
8 commentaire(s)
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Commentaire par Alex
mercredi 18 mars 2009 07:20
Un article de désinformation de grande qualité, comme Greenpeace sait si bien les écrire.
Quel dommage, les vrais problèmes sont noyés au milieu d'informations orientées ou même fausses !
[2]
Commentaire par Jean-Philippe
mercredi 18 mars 2009 08:59
Bravo Alex, belle réponse dûment argumentée !
[3]
Commentaire par Fabien
mercredi 18 mars 2009 18:41
Votre texte donne l'impression d'une industrie ou d'autorités étatiques irresponsables, qui ne se preoccupent de rien, ne préparent rien. Or vous savez bien qu'une loi de 2006 a prevu avec grands détails les procedures : retraitement, entreposage, stockage, reversibilité. Avec des délais, des dates butoirs, des procedures de consultation. Des experiences sont menées - laboratoire de Bure- des recherches prévues par la loi elle-meme pour la generation 4. Le meme soin est apporté dans des pays étrangers comme la Finlande, la Suède, etc... La Finlande est sans doute la plus avancée pour le stockage definitif. Donc il n'y pas impreparation, mais au contraire demarche systematique. Vous ne pouvez pas non plus considerer que l'ASN ne travaille pas avec methode. Bref, c'est une technique de Greenpeace de ne pas répondre globalement sur le fond mais de faire des actions ponctuelles et de donner des coups de projecteurs (sur tel ou tel transport de produits irradiés par exemple)pour donner l'impression de pagaille et d'imprévoyance. C'est une bonne technique de désinformation...
[4]
Commentaire par Jean-Philippe
mercredi 18 mars 2009 19:28
Encore une attaque "Ad hominem" et rien sur le fond ... avec tout le sérieux possible des agences pré citées le problème du stockage des déchets sur le long long long terme n'a pas de solution satisfaisante et sure. Pointer le fait que l'on va engager une politique de développement du nucléaire avant d'avoir un embryon d'idée sur le traitement des déchets sur le très long terme ne me paraît pas être de la désinformation. Le nier au contraire s'apparente clairement à de l'irresponsabilité...
[5]
Commentaire par Fabien
mercredi 18 mars 2009 19:45
Cher Jean-Philippe
Comment cela, rien sur le fond ? Pourquoi , en une pirouette, douter du sérieux d'agence comme l'ASN et dire qu'il n'y a pas l'embryon d'une idée ? Je parlais de la loi de 2006. Voici le lien qui permet de la consulter. :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000240700&dateTexte=

un peu ardu bien sûr mais un bel embryon
[6]
Commentaire par Jean-Philippe
mercredi 18 mars 2009 20:04
Ce n'est pas une loi qui change concrètement la réalité de l'état de la recherche scientifique sur le retraitement des déchets ... et la fameuse réversibilité ne semble être qu'un voeu pieux (si je comprend bien il y a une engagement de moyens mais pas de résultats). Oui, on peut réserver des sites, éventuellement garantir la surété de ces points de stockage ... pour 40 ans , 50 ans ? Qui miserait sa chemise la dessus ?

La plupart des signataires de cette loi n'auront plus en tous cas à engager leur mandat.
[7]
Commentaire par Hervé
dimanche 22 mars 2009 19:31
Le sérieux de GreenPeace et illustré de façon exemplaire par l'affirmation que les déchets issus de l'EPR seraient 7 fois plus dangereux que ceux provenant des réacteurs actuels. Chacun sait que l'énergie fournie par les réacteurs provient de la fission des noyaux d'uranium et de plutonium. L'énergie produite est donc strictement proportionnelle au nombre de fissions qui ont eu lieu. L'essentiel de la radioactivité des combustibles irradiés est due aux produits de fission. Par conséquent, exprimée par kWh produit, la radioactivité et donc la dangerosité de ce que GP appelle les "déchets" est la même pour l'EPR que pour les réacteurs plus anciens. Ce qui est possible c'est qu'il y ait une diffusion des radioéléments à l'intérieur des combustibles, ce qui peut amener à des modifications locales de la radioactivité de ces combustibles, mais leur radioactivité totale, celle qui compte, est pratiquement inchangée.
En ce qui concerne les sites, la Suède et la Finlande en on choisi (la Finlande a choisi le sous sol d'Olkiluoto, là où l'EPR est en construction). La France, quant à elle, a décidé d'ouvrir son site sur le plateau de Bures en 2025. Il faut ajouter que de nombreux calculs montrent que l'irradiation supplémentaire qui sera délivrée aux populations locales connaîtra son maximum dans plusieurs centaines de milliers d'années et restera largement inférieure au dizième de la radioactivité naturelle. Pour ceux qui sont prêts à l'effort de se renseigner vraiment je vous engage à consulter les documents suivants :

http://sauvonsleclimat.org/new/spip/IMG/pdf/dechets-long-final.pdf
http://sauvonsleclimat.org/new/spip/IMG/pdf/Andra-Synthese_2005.pdf
http://sauvonsleclimat.org/new/spip/spip.php?article203
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