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Primes à la casse : une bouffée d'air pour l'environnement


mercredi 19 mai 2010

Conçue comme un bouclier anti-crise, la prime à la casse n’a pas seulement aidé le marché automobile et les constructeurs à se maintenir à flots. Instaurée avec succès dans quelques 14 Etats membres de l’UE cette mesure a également apporté une bouffée d’air pour l’environnement.


Allant de 500 à 2500 € selon les pays, la prime à la casse a permis de se débarrasser de millions de vieux véhicules, de fait plus polluants que les nouveaux, mais aussi d’accélérer le renouvellement du parc automobile en Europe. Résultat : les émissions moyennes de CO2 ont baissé (jusqu’à 8 % en Italie en un an), de même que les polluants atmosphériques et le niveau sonore des moteurs. Alors que la sécurité des véhicules a progressé. Souvent accompagnée d’autres mesures incitatives, la prime à la casse participe d’un cercle vertueux en faveur de véhicules plus respectueux de l’environnement. Les ventes de petites cylindrées et de modèles alternatifs (hybrides, GPL et GNV) ont fortement augmenté en 2009.

L’environnement, grand gagnant de la PAC

Si la prime à la casse (PAC) stimule les ventes de voitures neuves en Europe, elle joue aussi un rôle majeur pour la défense de l’environnement. En effet, le remplacement des véhicules anciens (de plus de 8 ou 10 ans selon les pays) par des voitures neuves ou récentes a permis de moderniser rapidement le parc automobile et de rajeunir la moyenne d’âge des véhicules : actuellement de 7 ans environ dans l’UE.

Ce renouvellement accéléré des véhicules génère des progrès importants sur les plans écologique, sanitaire et sécuritaire. Selon le dernier rapport économique de l’UE sur les transports publié en mars 2010, les émissions de CO2 moyennes ont globalement baissé en 2009 : de 4,5 % en France et de 8 % en Italie. Une tendance due, entre autres, à la prime à la casse qui impose presque partout (sauf en Allemagne et en Angleterre) un niveau plafonné d’émissions (de 140 à 160 g).

Qu’ils soient neufs ou d’occasion, les véhicules achetés dans le cadre de la prime à la casse, doivent également répondre aux normes Euro 5 ou 4 au minimum. Par rapport aux véhicules remplacés, ils sont de fait plus efficaces, moins consommateurs de carburant, moins polluants (CO, NOX, PM, HC, etc.) grâce notamment aux filtres à particules sur les moteurs diesel.

Les voitures actuelles sont également moins bruyantes et plus sûres grâce à des équipements parfois obligatoires tels que l’anti-blocage de roues (ABS), le contrôle de trajectoire (ESP), les airbags, les prétensioneurs de ceintures, le limiteur de vitesse, etc. Tandis que la réglementation (chocs piétons par ex.) et les tests EuroNCAP mettent la barre toujours plus haut. Quant aux véhicules mis à la casse, ils ne sont pas envoyés dans les pays émergents pour une deuxième vie comme souvent par le passé. Ils sont récupérés, détruits et recyclés selon des normes européennes (notamment ISO 14000).

Un paysage automobile transformé

Du fait des plafonds de CO2 (entre 140 et 160 g selon les pays) fixés par la prime à la casse, les nouveaux modèles mis en circulation sont relativement "sages" : il s’agit le plus souvent de citadines ou de familiales compactes du segment A, B ou C.

En 2008, 71 % des voitures neuves immatriculées appartenaient à cette catégorie, selon le CCFA (Comité des Constructeurs Français d’Automobile). Une tendance qui ne cesse de s’accentuer au point de changer le profil du véhicule moyen en Europe. Alors que la cylindrée des voitures n’a cessé de croître entre 1990 et 2005, passant de 1600 cm3 à 1750 cm3, elle a chuté brutalement entre 2007 et 2009 pour revenir à 1600 cm3, d’après l’ACEA (Association des Constructeurs Européens d’Automobile). Le poids et la taille des véhicules tendent également à diminuer.

Cette évolution devrait s’accentuer encore ces prochaines années avec la technologie du downsizing. Selon le dernier rapport économique de l’UE sur les transports, la demande pour les véhicules émettant moins de 120 g / km de CO2 a progressé de 59 % entre 2008 et 2009. Tandis que le nombre de véhicules émettant moins de 120 g vendus dans cette même période est passé de 16 à 25 %. Les principaux gagnants sont les groupes Fiat, Volkswagen, PSA et Renault qui proposent tous un large choix de modèles en dessous de 140 g de CO2. Ainsi, ces marques ont-elles davantage tiré profit de la prime à la casse que les constructeurs haut de gamme comme BMW et Mercedes, spécialisés dans les grosses cylindrées.

Les primes à la casse en Europe (selon le rapport économique de l’UE)

En France

Instaurée en 2008 et prolongée jusqu’à la fin 2010 de manière dégressive, la prime à la casse française est passée de 1000 à 700 € en janvier 2010 et sera abaissée à 500 € à partir de juillet jusqu’à la fin de l’année. Elle est valable pour l’achat d’un véhicule neuf émettant moins de 155 g en l’échange d’un véhicule de plus de 10 ans. D’après le ministère de la Relance, environ 600 000 véhicules ont été vendus en 2009 grâce à cette mesure. Cela représente 26 % du marché des voitures particulières (2,2 millions au total) pour un coût de 600 millions d’euros. La grande majorité des véhicules achetés dans le cadre de cette prime émettent entre 101 et 120 g/km de CO2, soit des petites voitures également éligibles au bonus écologique de 700 €. Grâce à ces dispositifs, les émissions moyennes de CO2 pour les véhicules ont diminué de 4,5 % en 2009 à 134 g (140 g en 2008 et 149 g en 2007).

Repères :

Montant : 1000 € en 2009, 700 € puis 500 € en 2010 à partir de juillet
Ancien vhe (véhicule) > 10 ans
Nouveau vhe : VP ou VUL* (160 g/km de CO2 max.)
Durée : 2008-2010
*Véhicules Particuliers et Véhicules Utilitaires Légers

Au Royaume-Uni

Dotée d’une enveloppe de 400 millions de Livres, la prime à la casse britannique lancée en mai 2009 s’est terminée en mars 2010. D’un montant de 2000 £, elle était financée à moitié par les constructeurs pour l’achat d’un modèle neuf (VP ou VUL), en l’échange d’un véhicule âgé de plus de 10 ans. Elle a permis d’atténuer la chute des ventes en 2009 : - 6,5 % par rapport à 2008 (près de 2 millions d’unités). Au final, 285 000 voitures ont été immatriculées grâce à cette mesure, soit 14 % du marché total. N’imposant pas de seuil de CO2 au véhicule neuf, elle a néanmoins contribué à réduire les niveaux d’émissions. Les modèles achetés dans le cadre de la prime émettaient 133,3 g en moyenne, soit 10% de moins que les nouveaux véhicules neufs immatriculés et 30 % de moins que les véhicules destinés à la casse.

Repères

Montant : 2 000 £ dont 50% payés par les constructeurs
Ancien vhe > 10 ans
Nouveau vhe : VP ou VUL sans limite de CO2
Durée : 05/2009 – 03/2010

Espagne

Sur un marché en chute libre (- 17,9 % et - 41 % par rapport à 2008 et 2007), la prime à la casse espagnole apparue en décembre 2008 dans le cadre du Plan 2000 a limité les dégâts. Financée à moitié par les constructeurs, cette prime de 2000 € a déjà généré 125 000 immatriculations sur un total prévu de 280 000 nouveaux véhicules d’ici septembre 2010. Sa particularité : elle s’applique pour l’achat d’un véhicule neuf de moins de 30 000 € et rejetant moins de 140 g/km de CO2, ou pour l’acquisition d’un véhicule d’occasion de moins de 5 ans, à condition que celui-ci émette moins de 149 g (160 g pour un VUL*) et que la vieille voiture ait plus de 15 ans. Si les ventes ont augmenté de 20 % au premier trimestre 2009, l’année 2010 ne devrait pas être meilleure que 2008 en raison de l’arrêt du programme avant la fin de l’année.

Repères

Montant : 2 000 € dont 50 % payés par les constructeurs
Ancien vhe > 10 ans
Nouveau vhe : VP (140 g max.), VO* (149 g max.) ou VUL (160 g max.)
Durée : 01/2010-09/2010
* Véhicules d’occasion

 Pays-Bas

Oscillant entre 750 à 1750 € selon la nature du véhicule acheté (essence ou diesel) et l’âge du véhicule repris (13 ans pour un essence, 9 ans pour un diesel), la prime à la casse hollandaise avait comptabilisé 60 000 nouveaux véhicules en février 2010. Environ 27 % des voitures achetées dans le cadre de cette mesure sont des modèles neufs, la plupart équipés de moteurs essence. La prime devrait s’arrêter en juin 2010. Mais plusieurs villes importantes ont prévu de dégager des aides supplémentaires pour éviter un retrait trop brutal, en utilisant les mêmes systèmes et conditions que le gouvernement.

Repères

Montant : de 750 à 1 000 € pour un modèle essence ; de 750 à 1750 € pour un diesel
Ancien vhe > 13 ans pour un essence et 9 ans pour un diesel
Nouveau vhe : VP ou VUL neuf ou moins de 8 ans - diesel équipé de FAP (filtre à particules)
Durée : 2009-2010

 Roumanie

Pour relancer les ventes de voitures, le gouvernement roumain a instauré en mars 2009 une prime à la casse d’un montant de 3800 RON (915 €) pour le remplacement d’un véhicule de plus de 10 ans et l’achat d’un modèle neuf. Ce programme, qui représente 57 millions d’euros, est limité à 60 000 véhicules. A la fin 2009, quelque 34 000 véhicules neufs ont été immatriculés. L’opération est reconduite en 2010, mais les règles changent avec un système de vouchers : un voucher de 950 € est accordé pour chaque véhicule mis à la casse, 3 vouchers pour l’achat d’un véhicule neuf, soit plus de 2700 € ! Ces primes sont cumulables et il n’est pas nécessaire d’être le propriétaire du vieux véhicule pour profiter de cette mesure.

Repères :

Montant : 950 € (vouchers)
Ancien vhe >10 ans
Nouveau vhe : VP ou VUL
Durée : à partir de 02/2009

Allemagne

De janvier à septembre 2009, le marché automobile allemand a connu une période d’euphorie (+ 23,2 % en 2009 par rapport 2010), grâce à la prime à la casse, l’une des plus élevée d’Europe (2500 €). Au total, 5 milliards d'euros ont été débloqués par l'Etat allemand pour financer 2 millions de primes. Une aubaine pour le pays qui avait le parc automobile le plus vieux du continent (plus de 8 ans). Officiellement baptisée "prime à l'environnement", cette mesure était dépourvue de seuil d'émissions de CO2 ou de consommation de carburant. Il fallait se débarrasser d'un véhicule vieux d'au moins neuf ans et le remplacer par une voiture neuve ou âgée d'un an maximum.

Repères :

Montant : 2 500 €
Ancien vhe > 9 ans
Nouveau vhe : VP neuf (Euro 4) ou occasion de moins d’1 an.
Durée : 01/2009 – 12/2009

Italie

Grâce à la prime à la casse, le marché automobile italien est resté stable en 2009 par rapport à 2008, avec un peu plus de 2,1 millions de voitures vendues. Dotée d’un budget de 1,2 milliard d'euros, cette prime pouvait atteindre 5000 € pour l’achat d’un véhicule "vert". Ainsi les modèles hybrides ou carburant au gaz (GPL et GNV) ont augmenté de 21,6 % en 2009, au détriment des modèles diesel qui ont perdu 9 et 14 points par rapport aux deux années précédentes (41,8 % de part de marché). Au final, les émissions moyennes de CO2 ont baissé de 144 g à 136 g entre 2008 et 2009, soit une baisse importante de 8 g en un an. Après avoir retiré la prime à la casse automobile à la fin 2009, le gouvernement italien a décidé d’aider d’autres secteurs de l’industrie tels que l'électroménager, le textile et notamment les deux-roues.

Repères :

Montant : de 1 500 à 5 000 € pour les VP ; de 2 500 à 6 500 € pour un VUL
Ancien vhe > 9 ans
Nouveau vhe : VP Euro 4 ou moins de 130 g pour diesel, 140 g pour les autres carburants
Durée : 02/2009- 12/2009 (immatriculations jusqu’à mars 2010)

Retrouvez la suite du dossier Bilan des primes à la casse en Europe sur le site mobilité-durable.org

 

2 commentaire(s)
[1]
Commentaire par alrog
mercredi 19 mai 2010 11:20
On devrait pas en France parler de "prime à la casse", car la condition est l'achat d'un nouveau véhicule. Une "prime à la casse" digne de ce nom aurait permis en détruisant son vieux véhicule d'empocher un chèque pour louer ou partager une voiture, prendre le train ou les transports en commun, etc. Il s'agit simplement d'une réédition d'un classique soutien à l'automobile.

Le bilan environnemental de cette mesure et surtout son efficacité (coût de la tonne de CO2 évité) mériterait une analyse détaillée. Si les véhicules anciens sont sans doute plus polluants (en émissions au km), ils sont aussi les moins utilisés et donc leur remplacement ne générera que peu d'économies en volume d'émissions. En outre, certains véhicules récents à bas coût qui ont été plébiscités ont des consommations identiques à celles de modèles datant de 10 ans.

Il était facile de préparer une évaluation sérieuse en consignant pour chaque bénéficiaire l'âge, le modèle et le kilométrage compteur du véhicule remplacé, ainsi que le modèle remplaçant. Je ne crois pas que cela ait été fait, et il est probable que nous n'aurons jamais d'évaluation fiable.

Le bilan social de la mesure est encore plus douteux, car beaucoup de gens qui payent des impôts n'ont pas les moyens d'acheter une voiture neuve, même primée.
[2]
Commentaire par Tilleul
mercredi 19 mai 2010 17:57
mobilité durable est une opération de communication de Renault... On peut voir que les règles éthique du full disclosure n'ont pas encore traversé l'Atlantique...

Rappelons quand même quelques données basiques :

La moitié de l'empreinte environnementale de l'automobile c'est les infrastructures nécessaires (la route et son entretien). L'effet pervers étant que l'espace nécessaire pour les routes doit être retiré de l'espace dédié aux habitations et aux activités ce qui rallonge les distances et oblige les gens à acheter des voitures (dont l'arrivé nécessite à leur tour qu'on agrandisse les routes ce qui oblige à repousser encore plus loin les activités des habitations, répéter ad nauseam).

Ensuite sur l'empreinte environnementale de la voiture, la part lié à la construction de cette voiture est comparable à celle de sa consommation de carburant lors de son utilisation... Mettre à la casse une voiture vieille de quelques années pour la remplacer par une voiture neuve même plus efficace, c'est une erreur écologique majeure.

Cette mesure est donc nocive au niveau environnemental mais aussi nocive au niveau économique (équivalent à plusieurs milliers d'euro la tonne de CO2 économisé!) mais aussi social : destruction massive de biens en parfait état de marche, les employés de casses sont même profondément touché par ce gaspillage dramatique qui a été mis en place avec la complicité de l'état.
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