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L'énergie : pas assez présente dans la campagne électorale


jeudi 15 mars 2012

Les cours du pétrole flambent, le gaz entame un âge d’or, le nucléaire divise : les questions énergétiques restent encore trop absentes de la campagne présidentielle. Une analyse de Laurence Daziano.


Diplômée de l'ESSEC, de Sciences Po et de la Freie Universität de Berlin, Laurence Daziano est notamment maître de conférences en économie de l'entreprise à Sciences Po. Voir le site de Débat&Co

Qu'y a t-il de commun entre le grand froid qui vient de toucher l'Europe, la flambée continue des cours du pétrole, l'achat d'un tableau de Cézanne à 250 millions d'euros et le XII plan quinquennal chinois ? L'énergie évidemment, qui est au cœur de la croissance économique et de la redistribution des cartes entre le Nord et le Sud.Le monde aura besoin de 40 % d'énergie en plus d'ici à 2030 en raison de la croissance économique et démographique.

Or, que nous apprend le climat sibérien qui s'est répandu en Europe début février ? Trois leçons extrêmement claires : le monde est entré dans une nouvelle révolution énergétique où les pays développés, faute d'investissements, devront faire face à l'obsolescence de leur parc énergétique ; les choix nationaux auront des impacts majeurs sur l'indépendance énergétique (surtout en Europe dont 30% de l'électricité est d'origine nucléaire, soit la première capacité installée mondiale) ; l'approvisionnement en gaz de l'Europe est désormais contrôlé par Moscou alors que s'ouvre une période d'âge d'or du gaz.


Un enjeu d'indépendance

Première leçon : le monde est entré dans une troisième révolution énergétique, après celle du charbon et de la vapeur au XIXe siècle, puis celle du pétrole et de l'électricité au XXe siècle. Cette nouvelle révolution se caractérise par trois facteurs : la raréfaction des ressources fossiles ; une demande mondiale exponentielle ; un mix énergétique qui évolue porté par le nucléaire et les énergies renouvelables. Or, ce dernier point est capital car si le nucléaire ne peut pas être la réponse à tous les besoins énergétiques, il constitue néanmoins une solution indispensable pour les pays développés : l'énergie nucléaire est « propre » au sens carbonique du terme ; elle est économiquement compétitive puisque le prix de l'électricité produite est stable sur 40 à 60 ans ; elle contribue à l'indépendance énergétique. Faute d'investissements suffisants dans son parc nucléaire, la France devra faire face à l'obsolescence de ce superbe outil industriel.


Fracture Nord/Sud

Deuxième leçon : depuis Fukushima, le monde de l'énergie a changé. A une période de renaissance du nucléaire a succédé une période d'attentisme. En réalité, cet attentisme cache une fracture qui s'opère progressivement entre un Nord qui gèle ses projets et un Sud qui prend le relais dans les programmes d'équipements nucléaires. Les pays développés se tournent vers les énergies renouvelables pour réorienter leur mix énergétique. Ainsi, l'Allemagne a annoncé sa sortie du nucléaire, alors que l'Italie et les Etats-Unis ont ajourné leurs projets. En revanche, les grands émergents, qui doivent faire face à d'ambitieux besoins énergétiques, poursuivent leurs projets : la Chine construit actuellement 26 réacteurs nucléaires (40 % des projets mondiaux) et travaille à un réacteur conjoint avec la France ; l'Inde en construit 6 et finalise le contrat de deux EPR ; l'Afrique du Sud, qui dispose déjà d'une centrale nucléaire au Cap, a confirmé son projet de construire de 6 centrales ; la Russie a relancé un ambitieux programme national ; les Emirats arabes unis ont acheté deux centrales à la Corée du Sud...

Les projections font état de besoins estimés entre 125 et 300 nouveaux réacteurs d'ici à 2030. La France, qui dispose de la première industrie nucléaire, peut profiter pleinement de ces opportunités énergétiques pour vendre l'EPR (le réacteur le plus sûr au monde) et «  tirer » sa filière industrielle énergétique vers l'exportation.


Gaz : le nouveau pétrole

Troisième leçon : à la renaissance du nucléaire a succédé, depuis Fukushima, ce que certains éditorialistes appellent déjà « l'âge d'or » du gaz. Le gaz, dont les cours mondiaux sont tempérés par la mise en exploitation des gaz de schiste en Amérique du Nord, va progressivement prendre une part croissante dans le mix énergétique mondial. En effet, les grands consommateurs vont de plus en plus faire appel au gaz, comme l'indiquent le XII plan quinquennal chinois (2011-2015) ou les besoins énergétiques allemands. Ces pays accentuent ainsi leur dépendance envers les pays producteurs qui s'enrichissent : le Qatar, 3e producteur mondial, est ainsi devenu le pays le plus riche au monde en terme de PIB par habitant. Enfin, les routes du gaz dessinent un nouvel environnement géopolitique. La Russie, le Qatar, le Turkménistan ou des pays de transit comme la Turquie sont appelés à voir leur poids sur la scène internationale s'accroître dans les prochaines années. Il faudra en tenir compte.

La vente des Joueurs de cartes de Paul Cézanne, pour 250 millions d'euros, au Qatar vient nous rappeler que derrière l'achat du tableau le plus cher de l'histoire se cache une vaste redistribution des cartes énergétiques dans le monde, notamment entre le nucléaire et le gaz. Sous réserve de quelques préalables (une filière nucléaire en ordre de marche, une gamme de réacteurs plus importante et un Etat stratège), la France dispose d'atouts industriels majeurs pour profiter pleinement des opportunités énergétiques.
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13 commentaire(s)
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Commentaire par patrig k
jeudi 15 mars 2012 22:15
elle contribue à l'indépendance énergétique///

De quelle indépendance parlez vous, celle du Niger qui fournit 50% des besoins en uranium de la France, avec des couts, dont ce pays n'a jamais eu son mot à dire ...Le néocolonialisme dans toute sa splendeur ..et la famine qui guette !

125 à 300 réacteurs de plus de quoi ? Du quitte ou double...

En réalité du remplacement, et vos projections diffèrent de celles de l'AIEA ..

A propos combien êtes vous payé pour faire propagande ? Avez vous versé votre part aux exilés atomiques japonais en cause des mafias de TEPCO ?

Les Kws exorbitants de cette technologie la plus stupide au monde pour bouillir de l'eau à 300°c sous 155 bars, et de produire avec un rendement aussi minable ...avec des risques, dont l'état français ne serait pas en mesure d'en assumer sa charge et responsabilité ! Les fadas cocoricos

Et pas un mot sur l'économie d'énergie , pas un mot , la théologie de la croissance sans fin .. le mode occidental qui est en faillite .. Et les ingés n'ont rien vu , pathétique ce que la promo fait dire comme idiotie
[2]
Commentaire par patrig k
jeudi 15 mars 2012 22:37
A votre bon coeur ...

Si AREVA est en mesure de perdre 2.5 milliards d'euros à son excercice 2011, vous l'ingé, pouvez vous nous expliquer ce fait ? Le mirage atomique au Niger ...

Les Nigériens ont chiffré le manque à gagner sur le court de l'uranium, 20 milliards d'euros estimés et perdus depuis les années 1961 et les accords militaires de la Françafric, au nom de l'indépendance coloniale atomique .. et que dire de ces ventre creux ..

Extrait AFP 10/3/2012

« La FAO sollicite au moins 69,8 millions de dollars de fonds supplémentaires pour venir en aide à 790 000 familles agricoles et pastorales », poursuit l’agence, précisant que « 15 millions de personnes au bas mot sont à risque d’insécurité alimentaire au Sahel ».

« Ce chiffre comprend 5,4 millions de personnes au Niger (35% de la population), 3 millions au Mali (20%), quelque 1,7 million au Burkina Faso (10%), environ 3,6 millions au Tchad (28%), 850 000 au Sénégal (6%), 713.500 en Gambie (37%) et 700.000 en Mauritanie (22%) », précise la FAO.
[3]
Commentaire par Gépé001
vendredi 16 mars 2012 07:44
Le problème de l'énergie doit être abordé suivant quatre points:
1°-le climat,avec les émissions de CO2,
2°-la technique,avec l'épuisement des ressources,
3°-le commerce avec l'évolution des prix,
4°-l'économie avec la relation "cout du travail/prix de l'énergie".
C'est ce dernier point qui doit faire l'objet de notre réflexion.On doit ajouter la géopolitique.
[4]
Commentaire par irisyak
vendredi 16 mars 2012 15:39
En effet cette question mérite d'être discutée aux yeux des français. A discuter avec eux le nucléaire ne peut être abandonné. Seulement pour les coûts c'est toujours à l'autre de payer ... L'autre est trop souvent compris comme étant les générations futures ...
Tous les pays qui commencent à installer cette énergie ont 50 ans pour en voir les conséquences ... Pour un homme politique c'est trop loin ...
Ainsi une telle discussion chez nous arrive un peu tôt en ce sens que nos concitoyens n'ont pas encore eu à payer les conséquences d'un accident assez puissant pour faire réfléchir ...

http://greengrowing.ove-blog.com
[5]
Commentaire par yan13
samedi 17 mars 2012 13:24
@ l'auteur:

Quelle jolie propagande nucléaire vous nous servez !

"..le nucléaire constitue néanmoins une solution indispensable pour les pays développés.. "
FAUX ! N'enterrez pas trop vite l'Allemagne (pays célèbre pour son économie en ruine), l'Autriche, la Norvège, l'Italie...

"...l'énergie nucléaire est « propre » au sens carbonique du terme "
Faux. Le bilan CO2 complet de la filière nucléaire est loin d'être nul; de plus quand on considère la facture abyssale de Fukushima (au bas mot 100 milliards, au pire on ne saura jamais), ne trouvez vous pas indécent et insultant d'employer le mot "propre" pour le nucléaire ?

"..elle est économiquement compétitive puisque le prix de l'électricité produite est stable sur 40 à 60 ans "
FAUX, la courbe d'expérience du nucléaire est en perpétuelle hausse (à l'inverse des ENR). A chaque nouveau rapport de la Cour des Compte les prix augmentent, on est actuellement à 70-80 € / MWh pour l'EPR. Sans compter la gigantesque escroquerie à l'assurance qui consiste à ne (presque) rien provisionner pour les accidents

"...elle contribue à l'indépendance énergétique."
FAUX, Plus un seul gramme d'uranium n'est extrait en France

"..faute d'investissements suffisants dans son parc nucléaire, la France devra faire face à l'obsolescence de ce superbe outil industriel."
VRAI ou presque, et dans ce cas ça contredit complètement votre affirmation précédente sur la "stabilité du prix du kWh nuc
[6]
Commentaire par deducon
dimanche 18 mars 2012 09:31
pourquoi , c'est simple !..tous savent bien qu'aujourd'hui la principale solutions mises en avant , à savoir principalement l' éolien industriel , n'est absolument pas défendable ...ni techniquement , ni économiquement , ni écologiquement , ni environnementalellement et ni sociologiquement . Bref un trés mauvais choix pour la France , complètement inadapté et sans avenir, où tous se sont engouffrés pour des raisons de clientélisme politique .
[7]
Commentaire par Hervé
lundi 19 mars 2012 18:47
@ L'auteur

Vous avez parfaitement raison, nous sommes à un tournant énergétique. L'économie mondiale est fortement basée sur l'énergie du pétrole et nous avons atteint la limite de ce modèle. Les futures orientations sont capitales pour notre avenir. Dommage que ce ne soit quasiment pas évoqué lors de la campagne.

Pour ma part je considère qu'il serait une erreur de concentrer la demande sur le gaz. D'une part c'est une énergie plus difficile à transporter, et nous rendrait très dépendant. D'autre part, les chimistes en ont grand besoin pour faire autre chose que de la chaleur (engrais,...). C'est pourquoi il faut a tout prix ne pas considérer le gaz comme une solution de remplacement, et se tourner vers d'autres méthodes que les énergies fossiles.
[8]
Commentaire par Monnier
mardi 20 mars 2012 19:26
Le niveau de compétences n'est pas bien élevé à Sciences-Po, mais on trouve partout des perroquets pour répéter le discours tenu depuis 40 ans par l'industrie nucléaire et ses obligés politiques.

Ce serait gentil de transmettre à l'auteur quelques informations complémentaires, comme celle-ci :

Réacteurs nucléaires mis en service : 2011-2015

" Entre 2011 et 2015, 60 réacteurs nucléaires seront mis en service dans le monde, d'une
capacité totale de 57.200 MW et pouvant produire 411 TWh d'électricité par an. Pour la
même période, une capacité totale de 254.400 MW pouvant produire 624 TWh par an
sera installée en éolien et une capacité de 91.600 MW en solaire photovoltaïque pourra
produire 96 TWh d'électricité par an.

La production d'électricité d'origine éolienne sera ainsi équivalente à celle de 86 réacteurs
nucléaires de 1.000 MW (taille moyenne des réacteurs en construction), celle d'origine
solaire photovoltaïque équivalant celle de 13 de ces réacteurs nucléaires. "
[9]
Commentaire par Monnier
mardi 20 mars 2012 19:27
J'allais oublier ceci : Production électrique nouvelle 2011-2015 - éolien nucléaire

" La capacité installée et la production annuelle d'électricité ajoutée de l'éolien et du
solaire dépasseront celles du nucléaire chaque année de 2011 à 2015, dans le monde. "

Et encore, le coup de frein de 2011 porté au nucléaire n'était pas pris en compte. La Chine n'a pas commencé la construction d'un seul réacteur nucléaire en 2011 et ceux en cours de construction sont retardés pour modifications.
[10]
Commentaire par Hervé
samedi 24 mars 2012 20:48
@ Monnier

Avec une petite nuance tout de même: Sans stockage, l'éolien a du mal à peser beaucoup dans un mix.

Malgrés tous les efforts déployé depuis de nombreuses années, les pays nordiques peinent à dépasser 20%... Et nous nous n'avons ni pétrole ni charbon, contrairement à eux. (Bon on a peut être du gaz....)
[11]
Commentaire par patrig k
mardi 27 mars 2012 21:45
@Hervé ...


Sans stockage /// quand il n'y a plus (ou si il n'y a plus ..) de réservoir pour ta caisse auto, tu fais quoi, tu téléphone au cea pour te faire construire une centrale nuk ?

STEP ... et autres technologies , plutôt que de perroqueter sans cesse ...

comme un conservateur nucléophate
[12]
Commentaire par Hervé
mercredi 28 mars 2012 18:29
@ Patrig K
Les Steps, ou vous les mettez?, qui va les payer?
Les autres technos, lesquelles? Combien ça coûte? Est ce que ça va suffire? Conflit d'usage? Réaliste au moins?
Merci de développer avant de critiquer.

Disons que si le CEA construit des centrales Nuke qui évitent de brûler le pétrole pour chauffer des maisons,... mon réservoir a quelques chances de pouvoir être rempli encore quelques temps pour pas trop cher...

Moi ce que je constate c'est que pour le moment, malgré les enorrrrrmes investissements consentis par les pays du nord dans les ENR, il font 20% de l'elec c'est à dire que dalle. Aller plus loin va devenir de plus en plus compliqué pour eux... Comparativement au besoin total d'énergie, les ENR, ce sera peanuts pour encore longtemps...
[13]
Commentaire par La chaîne Energie
mardi 01 mai 2012 09:55
C'est pas du vrai travail
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