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 - Rédacteur en chef de European Energy Review

Auteur
Karel Beckman, journaliste, est rédacteur en chef de European Energy Review, plateforme interactive d'informations consacrée aux problèmes de la transition énergétique en Europe.

Solaire: Desertec survivra-t-il aux révolutions d’Afrique du nord?


mercredi 09 mars 2011

Tunisie, Egypte, Libye : les révolutions des pays arabes ont une indiscutable dimension énergétique, pour le pétrole sans doute, mais aussi pour les énergies renouvelables. Que va devenir le projet Desertec dans le contexte actuel?


Les troubles politiques en cours au Maghreb et au Machrek ont fait naître des doutes sur les perspectives du projet Desertec (voir article de la chaîne Energie), destiné à enclencher la révolution du renouvelable dans la région.

Mais les responsables sur place du projet voient dans les développements actuels un facteur positif plutôt que négatif. "Ce que nous offrons avec Desertec c'est l'emploi et des opportunités économiques pour les populations en croissance rapide d'Afrique du nord et du Moyen-orient. Or c'est exactement ce que réclament les peuples", déclare Mouldi Miled, directeur exécutif du réseau Desertec University, mis récemment en place pour coordonner la recherche sur l'énergie en Afrique du nord.
 
"Je suis confiant, la situation post-révolutionnaire sera plus favorable que la précédente: nous aurons plus de transparence, un meilleur environnement pour les affaires. Ce sera bon pour les investisseurs", ajoute Mouldi Miled. Ancien homme d'affaires, il est l'un des fondateurs de l'Université Desertec (Desertec University Network, DUN), une plateforme pour la coopération scientifique au sein du projet lui-même, réunissant une vingtaine d'université et d'institutions de recherche en Egypte, Algérie, Jordanie, Libye, Maroc, Tunisie, de même qu'en Allemagne, Italie, France et Suisse.

Dans une interview avec European Energy Review par téléphone depuis Tunis, M. Miled souligne que Desertec vise à réaliser des projets adaptés aux zones isolées. Cela devrait répondre à un besoin exprimé par le peuple tunisien dans sa révolte. "Les projets seront conduits dans le désert, loin de la côte, et vont impulser la croissance locale. C'est important car il y a actuellement un gouffre en matière dé développement entre les zones côtières et les régions intérieures du pays. C'est l'une des cause du soulèvement populaire".

Paul van Son, le directeur exécutif de Desertec, est lui aussi positif et souligne que le projet est important non seulement pour les pays d'Afrique du nord, mais aussi pour l'Europe. "C'est un nouveau partenariat possible avec les pays de la rive sud de la Méditerranée, dit-il. C'est le moyen de maîtriser les défis démographiques et énergétiques qui nous attendent : les population du Moyen-Orient et de l'Afrique du nord vont doubler d'ici 2050 et atteindre 700 millions. La jeunesse de ces pays va avoir besoin d'emplois et de perspectives. Nos projets énergétiques seront un élément essentiel pour leur avenir, et pour le nôtre". En ce qui concerne la Tunisie précisément, le projet Desertec peut, selon lui, en faire un pays clé de l'Afrique du Nord, à partir duquel l'énergie renouvelable pourra s'étendre à d'autres pays .

Satisfaire avant tout aux besoins régionaux

Mouldi Miled insiste sur le fait que l'objectif premier de Desertec est de stimuler la production d'énergies renouvelables pour satisfaire les demandes domestiques grandissantes de la région. "Il y a souvent une conception erronée en Europe où l'on pense que Desertec vise à produire de l'énergie solaire au Sahara pour l'exporter vers l'Europe. Or l'exportation vers l'Europe est seulement un objectif secondaire, même sil n'est pas négligeable dans la mesure où il peut favoriser les investissements nécessaires. Mais nous avons avant tout besoin de l'énergie pour nous-mêmes. Nos populations consomment de plus en plus et nous avons un besoin considérable d'énergie pour la désalinisation de l'eau de mer. Car tous les pays concernés connaissent des pénuries d'eau et celles-ci vont aller en s'aggravant du fait de la pression démographique".

Mouldi Miled reconnaît que les pays d'Afrique du nord ont un long chemin à parcourir en matière d'énergies renouvelables. « Nous débutons à peine. Nous avons peu de compétences, peu de formations, peu de professeurs ». C'est l'une des missions de DUN, l'Université Desertec.

DUN est la deuxième structure créée par la Fondation Desertec, fondée en janvier 2009 par le Professeur Gerhard Knies, soutenu par l'association allemande du Club de Rome et le Prince Hassan bin Talal de Jordanie. La première structure créée avait été la Desertec Industrial initiative (DII), un consortium d'entreprises privées chargé de monter le cadre légal, économique et technique d'ici la fin 2012 pour le projet.
 
Voir l'article complet en anglais sur European Energy Review
Voir aussi l'article de "la chaîne Energie" sur le projet Transgreen 
  
2 commentaire(s)
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Commentaire par Pierre Antoine
mercredi 09 mars 2011 19:05
Effectivement, l’idée qu’on construise des centrales nucléaires, des parcs solaires et éoliens en Afrique du Nord pour ensuite récupérer l’électricité en Europe traîne ici ou là. C’est une vieille habitude ! En fait, s’il y a partage entre les deux rives de la Méditerranée, il doit être équilibré et répondre à une logique énergétique. Quand les éoliennes de Mer du nord tourneront trop vite , l’électricité pourra partir au sud. Quand le soleil tapera très fort, le surplus d’électricité pourra aller au nord. D’où la nécessité de connecter au maximum les réseaux, comme le fait la « boucle méditerranéenne » en construction. L’un des points de blocage était la Libye. Espérons que la chute de Kadhafi permettra de la terminer…

[2]
Commentaire par KAOUACHE Tarek
lundi 21 mars 2011 06:48
Puisque l'europe envisage la désalinisation de l'eau de mer pour satisfaire ses besoins grandissants en eau potable et que la perte globale pour le transfert de l'électricité produite dans le cadre du projet Desertec d'Afrique du nord vers l'Europe est estimée à 10,5 - 11 %, pourquoi ne pas envisager la désalinisation de l'eau de mer carrément en Afrique du nord ? J'imagine que les pertes seraient moins importantes et cela créerait plus de postes d'emploi sur place.
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