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Paul Broutin (IFP) : quel coût pour le captage de CO2 ?


lundi 02 juin 2008

Interrogé par « l’usine à GES », Paul Broutin, coordonnateur du projet européen Castor sur le captage et stockage de CO2 et chef de projet à l'IFP, fait le point sur quatre sites en Europe et évalue l’impact de cette technologie sur le rendement des centrales thermiques


Lancé dans le cadre du 6e PCRD (Programme-cadre pour la Recherche et le Développement), le projet Castor visait à améliorer les connaissances des sites potentiels de stockage de carbone en Europe et à faire progresser les techniques de capture de CO2. Coordonnateur de Castor, au sein de l'Institut Français du Pétrole, Paul Broutin dévoile les résultats de ce programme.


Voir l’interview complète dans la dernière lettre de l’usine à GES.
Le site de l'IFP

(Extrait)

L'Usine à GES : Le captage de CO2 a la réputation de diminuer le rendement des centrales. Avez-vous progressé sur ce point ?

PAUL BROUTIN : Il est vrai qu'une installation de captage fait baisser d'une dizaine de
points le rendement d'une chaudière. Raison pour laquelle, il nous paraît nécessaire de ne capter que le CO2 émis par les chaudières supercritiques, dont le rendement, avant captage, atteint 45%. Par ailleurs, nous avons testé des solvants qui, couplés avec une bonne intégration thermique, permettent de gagner jusqu'à 1,4 point de rendement en plus.

Economiquement, où en êtes-vous ?

Prenons le cas d'une centrale au charbon de 600 MWe. Avant captage, elle rejette 750 kg de CO2 par MWh produit. Le tout à 38 euros du MWh. Avec captage, la production d'électricité est réduite à 480MWe et le coût grimpe à 65 euros. Le surcoût est donc de 27 euros. Mais le système de captage va éviter l'émission de 635 kg de CO2 par MWh. Si l'on divise 27 euros par 0,635, on obtient un coût d'une quarantaine d'euros par tonne de gaz carbonique évitée.

Y-a-t-il encore des marges de progrès ? 

Nous pouvons améliorer les performances des solvants et leurs capacités à être régénérés,ce qui permettrait de diminuer d'autant la consommation d'énergie. C'est d'ailleurs l'un des objets du projet Cesar, que nous avons lancé à la suite de Castor. Nous pouvons aussi utiliser de meilleurs contacteurs gaz/liquide tels des contacteurs membranaires afin de réduire la taille des installations et donc l'investissement.

Passons aux travaux sur le stockage proprement dit...

Dans le cadre de Castor, nous avons étudié quatre sites de stockage.
Le premier est un gisement de pétrole, situé à 45 km au large de l'Espagne, exploité par Repsol. Selon les résultats de nos recherches, le bloc Casablanca pourrait tout à fait recevoir 500 000 t/an de CO2 ce qui permettrait de stocker les émissions de dioxyde de carbone de la raffinerie de tarragone. Repsol devra cependant poursuivre les études avant d'envisager un tel stockage et certainement mener quelques travaux de consolidation des puits de production.
En Autriche, le gazier Rohoel a étudié le potentiel de stockage (200 000 tonnes de CO2 par an) du champ gazier d'Atzbach-Schwanenstadt. Il ne devrait pas être donné suite à ce projet. Sur le site gazier K12B, où GDF Pays-Bas injecte déjà du CO2 dans le cadre du programme Crust (lire L'Usine à GES n°20), nous avons étudié la diffusion du gaz carbonique dans la roche.
Enfin, nous avons aussi travaillé sur l'aquifère de Snøhvit dans lequel StatoilHydro devrait prochainement injecter le CO2 qui sera extrait du gaz naturel produit.

Globalement, que peut-on tirer de ces quatre études de cas ?

Nous avons mis au point une méthodologie d'étude et de caractérisation des réservoirs, qui pourra être utilisée partout ailleurs. En particulier, il a pu être testé le logiciel COORES développé par l'IFP pour simuler l'injection du CO2 et la stabilité long terme du stockage.

Vous avez lancé, en février, le programme Cesar. En quoi consiste-t-il ? 

Ce nouveau projet du 7e PCRD sera en quelque sorte la suite du sous- programme Castor dédié au captage. Nous allons étudier, sur le pilote de Dong, trois nouvelles formulations de solvants traditionnels. Sur ce pilote sera également étudié l'impact du captage sur le plan environnemental.
D'autres types de solvants plus futuristes tels les carbonates et des polymères en solution seront étudiés au laboratoire.
Enfin, nous allons tenter de réduire la taille des installations, en proposant l'emploi de contacteurs membranaires. L'IFP testera notamment des modules construits par Polymem, qui est une PME installée sur Toulouse.

Propos recueillis par Volodia OPritChnik.

Paul Broutin
Chef de projet à l'IFP


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