Participez aux débats sur l'énergie de demain

Auteur
Thomas Porcher est docteur en économie, Professeur à l'ESG Management School et fondateur de GBP-conseil. Il est l'auteur du livre "Un baril de pétrole contre 100 mensonges" - Ed...

La Libye va-t-elle quitter l’OPEP ?


mardi 13 septembre 2011

La production libyenne de pétrole reprend peu à peu. Mais les mécanismes de l'OPEP peuvent handicaper cette reprise et limiter les investissements de la Libye post-Khadafi. Un paradoxe qui pourrait conduire Tripoli à ...quitter l'OPEP.


Alors que le Conseil National de Transition (CNT) -qui contrôle la majeure partie du pays- n'a toujours pas fini la bataille contre les pro-Kadhafi, la reprise de la production libyenne de pétrole fait déjà débat et divise.

En cinq mois de conflit, la production de pétrole en Libye est passée de 1,6 million de barils par jour à 50 000 barils. Selon Ali Tarhouni, chargé du département pétrole au sein du CNT, la production de pétrole libyenne pourrait repartir d'ici à quelques semaine, alors que l'Agence Internationale de l'Energie (AIE), plus pessimiste, ne prévoit pas un retour à la normal avant 2013.

Le problème est que l'économie libyenne est largement dominée par le secteur pétrolier, qui constitue 80% des ressources publiques, et plus de 95% des exportations. Sans pétrole, les investissements nécessaires à la reconstruction risquent d'être faibles. Bien au-delà de la reconstruction, le simple fonctionnement de l'économie libyenne, avec une population active d'un million de fonctionnaires, dépend directement des ressources publiques, dont les recettes sont fortement liées à la production pétrolière.

Les besoins du secteur privé

Le secteur privé est également lié au secteur pétrolier. Il dépend d'une part de l'ensemble des revenus qui circulent dans le pays et de la consommation, et d'autre part des dépenses publiques d'investissement et de maintenance des infrastructures. L'augmentation du montant des ressources publiques, due au prix élevé du baril de pétrole ces dernières années, a donc permis de faire croître une économie non pétrolière et rentière. Enfin, il faut ajouter aux coûts directs du conflit le manque à produire des années suivantes, dû à la destruction des infrastructures et à la baisse de l'ensemble des indicateurs sociaux.

Or, appartenir à l'OPEP impose à la Libye de produire du pétrole par quotas sur un mode de calcul basé en fonction de ses réserves. Avant le conflit, la Libye produisait 1,6 million de barils par jour -soit 2% de la production mondiale- pour des réserves estimées à 44 milliards de barils. La gestion de la rente pétrolière par quotas consiste à laisser le pétrole sous terre afin de le préserver pour les générations futures et en sortir seulement les quantités nécessaires au besoin de financement de l'économie. C'est également une stratégie concurrentielle dont le but est d'établir, en jouant avec les quotas, une tranche de prix suffisamment élevée pour rendre rentable l'exploitation des gisements de la zone non-OPEP (c'est-à-dire des concurrents) et provoquer ainsi leur épuisement. Dans les deux cas, la stratégie de l'OPEP est une stratégie de long terme s'adressant à des pays engrangeant de forts excédents budgétaires.

La tentation de quitter l'OPEP

Dans ces conditions et en l'absence d'un retour rapide de la production pétrolière d'avant-conflit, la Libye ne pourra se reconstruire qu'en recourant à des emprunts gagés sur le pétrole. Or, plus les recettes pétrolières (ou leur estimations) seront élevées, plus les prêts demandés le seront aussi. La Libye pourrait donc être tentée de quitter l'OPEP, même provisoirement - comme cela a été le cas pour l'Equateur entre 1992 et 2007. Le but étant de faire des prêts sur le gage d'une production à pleine capacité, c'est-à-dire autour de 3 millions de barils par jour.

Même dans le cas d'un retour rapide de la production dans les prochains mois, la Libye aurait donc intérêt à sortir de l'OPEP pour pouvoir investir fortement dans la reconstruction des infrastructures mais aussi dans la création d'un véritable secteur privé indépendant du pétrole. Au niveau mondial, cette augmentation de la production libyenne serait même bénéfique car, en augmentant l'offre, elle détendrait le marché, ce qui pourrait baisser les cours du baril.
 

 
1 commentaire(s)
[1]
Commentaire par Chelya
mardi 13 septembre 2011 23:08
...ou alors il font comme tous les membres de l'OPEP et ils "découvrent" de nouvelles réserves à chaque fois qu'ils veulent augmenter leurs ventes
PARTICIPEZ !
Cet espace est le vôtre !
La chaîne Energie de LExpansion.com
vous ouvre ses colonnes. Partagez vos analyses !