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Thomas Porcher est docteur en économie, Professeur à l'ESG Management School et fondateur de GBP-conseil. Il est l'auteur du livre "Un baril de pétrole contre 100 mensonges" - Ed...

Crise et prix du pétrole: une baisse pourrait cacher une hausse


jeudi 13 octobre 2011

Le ralentissement économique mondial pousse à la baisse de la demande, à un moment où l'offre devrait reprendre avec le retour du pétrole libyen. Mais le prix du pétrole n'a guère l'habitude de rester à un niveau durablement bas...


A cause du ralentissement économique mondial, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a de nouveau révisé à la baisse ses prévisions de la demande mondiale de pétrole pour 2011 et 2012. Goldman Sachs et l'OPEP ont également abaissé leurs prévisions pour 2012.

De l'autre côté, l'offre devrait augmenter avec la reprise de la production libyenne plus rapide que prévu et qui devrait atteindre progressivement son niveau d'avant conflit d'ici quinze mois. Dans cette configuration, le prix du pétrole devrait donc descendre et la force de sa chute dépendra du rapport entre l'ampleur de la crise affectant la demande et la rapidité de la reprise de la production libyenne.Mais même s'il y avait baisse du prix du pétrole cela ne pourrait être que de courte durée pour deux raisons.D'abord parce que les pays de l'OPEP -surtout l'Arabie Saoudite qui compense actuellement la production libyenne- baisseraient leurs quotas pour adapter l'offre à la demande. C'est d'ailleurs déjà le cas, avec un léger recul de la production d'Arabie Saoudite en raison du retour partiel de la production libyenne.

Ensuite, à cette compression de l'offre s'ajoutera la compression de l'offre des pays non-OPEP décidée par les compagnies pétrolières qui refuseront d'utiliser des gisements non rentables. Car chaque hausse des prix du baril augmente fortement les investissements dans la recherche et rend la production rentable dans de nouveaux gisements plus coûteux. A l'inverse, avec une baisse du prix du baril en dessous du coût d'extraction de ces gisements, la vente de ces barils représente une perte pour la compagnie.

Une baisse du prix du pétrole entraîne donc mécaniquement une double compression de l'offre. Force est de constater que le prix du pétrole ne peut rester durablement bas lorsqu'il a été haut pendant une certaine période.

L'impact de la spéculation

Il faut également noter que l'OPEP ajuste ses quotas en suivant l'évolution de la demande, de sorte que l'offre égale tout juste la demande. Un niveau de prix précis est difficile à établir car il dépend de l'action non-coordonnée de l'OPEP et des compagnies pétrolières mais également de la force de la crise qui pèse sur la demande.

A cela, il faut également ajouter la spéculation. Mais on peut assurément prévoir que si le prix subit une forte variation à la baisse -qui proviendrait d'une forte baisse de la demande- l'offre rééquilibrera le marché et le prix remontera. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé entre décembre 2008 et juin 2009 où le prix -après avoir dégringolé de 150$ à 40$- était passé de 40$ à 70$ à cause de la double compression de l'offre. Le problème est que, face à la crise inédite, l'OPEP avait tardé à réagir et avait du se réunir deux fois pour réduire son offre ce qui n'aura probablement pas lieu cette fois-ci.

Le marché pourrait donc se retrouver dans une situation où l'offre et la demande se stabiliseraient à un niveau bas. Ce qui en cas de rebond de la demande des émergents comme le prévoit Goldman Sachs en 2012-2013 -la demande, ou les anticipations de la demande via les contrats à terme, étant plus flexible que l'offre- le prix du pétrole pourrait repartir en flèche.

La stabilisation des cours à un prix plus bas dépendra alors du bon vouloir de l'OPEP (ou de la possibilité de trouver un consensus entre ses membres) et des compagnies pétrolières. Le problème est qu'une situation avec un prix élevé et une production plus faible entre dans la stratégie de long terme de l'OPEP qui vise à produire par quotas afin d'obtenir un prix suffisamment haut pour épuiser les réserves des pays non-OPEP et ainsi augmenter ses parts de marché. L'organisation aura-t-elle intérêt à ouvrir les robinets pour faire baisser les prix du pétrole ? Est-il rationnel pour un producteur de produire beaucoup plus (et, dans le cas de l'OPEP, de faire baisser les prix) s'il peut produire deux fois moins et vendre deux fois plus cher ? La solution au problème sera probablement plus diplomatique qu'économique.
 
1 commentaire(s)
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Commentaire par radin78
jeudi 10 novembre 2011 12:33
Bonjour,

Je ne crois pas que le prix du baril de pétrole WTI restera longtemps sous les 100 $ et les produits qui en découlent subiront la même pente vertigineuse.
En effet, si l'on suit par exemple le prix du fioul domestique ( historique consultable sur www.prix-du-fuel.com ) on voit bien que le prix du litre de fioul flirte avec les 90 centimes d'euros depuis presque 6 mois.
Ce niveau, même si il est inférieur au record de 2008, est désormais maintenu depuis une période de plusieurs mois. Cela signifie que le prix moyen annuel du fioul domestique sera en 2011 supérieure à celui de 2008.
On voit donc bien que malgré la crise actuelle, le prix du fioul domestique n'a jamais été aussi élevé.
Je vous laisse imaginer quelle sera son évolution quand la reprise montrera le bout de son nez !!
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