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 - Administrateur de Sortir Du Nucléaire

La loi NOME ou le partage de la dette nucléaire


mercredi 23 juin 2010

Les dispositions de la loi NOME n'ont pas séduit le Réseau "Sortir du Nucléaire". Dans cette tribune, les antis taclent une disposition injuste, qui entérine la technologie nucléaire et propose d'en faire payer la dette aux générations futures.


Le 15 juin 2010, les députés votent la loi NOME (Nouvelle Organisation  du Marché de l'Electricité), en vertu de laquelle, et en conformité avec les directives européennes, EDF devra céder un quart de son électricité à ses concurrents à un prix fixé.

Or, le contenu de la loi NOME  verrouille l'avenir de la politique énergétique française, en entérinant le règne de la technologie nucléaire. Ainsi, elle acte la prolongation  de la durée de vie des réacteurs jusqu'à 2025 et le renouvellement du  parc nucléaire français, et ce, même s'il paraît difficilement envisageable que la prolongation de la vie des centrales au-delà de 30 ans soit supportable financièrement pour EDF. Sans compter le coût de l'enrichissement du combustible, du retraitement…. C'est d'ailleurs l'une des principales raisons de l'exigence d'EDF d'augmenter ses tarifs de quelques 20 à 25%... Mais il est plus scandaleux encore de constater que le contribuable qui finance déjà ce service public, finance également les exportations d'électricité (12%), et, avec la loi NOME participera à l'enrichissement de compagnies privées.

Le Réseau «Sortir du nucléaire» conteste le  bien fondé de ces orientations, lourdes de conséquences économiques et environnementales. Car la loi NOME n'accorde aucune  place aux seules évolutions à même de fonder une politique énergétique d'avenir : on n'y trouve rien pour inciter à la sobriété énergétique, au développement des énergies renouvelables et décentralisées, ni sur une  tarification progressive de l'énergie. La tarification solidaire et progressive (plus on consomme, plus le prix augmente), concept porté par de multiples mouvements sociaux, permettrait d'inciter les ménages à économiser l'électricité. Une idée d'autant plus pertinente lorsque l'on sait que la consommation d'électricité augmente avec le revenu des ménages et que la dégressivité (plus on consomme, plus le prix diminue) des tarifs électriques, pratiquée dans le cadre actuel et accentuée suite à la libéralisation du secteur, pénalise, elle, de facto,  les ménages à bas revenus.

Les débats autour de la loi NOME, si houleux qu'ils soient, témoignent  finalement d'une navrante unanimité : à droite comme à gauche, perdure  le mythe insensé d'une énergie nucléaire bon marché, qui aurait  contribué à la prospérité de la France et constituerait un héritage à préserver.

Le prix de revente probable du MWh, fixé à 42 €, est d'un optimisme que  les faits contredisent, à commencer par les surcoûts actuels et à venir  du réacteur EPR ; selon l'AIEA(agence internationale pour l'énergie atomique) elle-même, le prix du MWh EPR pourrait  atteindre 69 €[1]. Sans parler des dépenses faramineuses (des centaines  de millions d'euros) qui seraient nécessaires pour prolonger la durée de vie d'un parc nucléaire de plus en plus vétuste[2].

Les modes de calcul et les données initiales utilisées par l'Etat sont totalement opaques. De nombreux coûts sont cachés. Certaines dépenses à venir sont dramatiquement minimisés, comme ceux du démantèlement des installations nucléaires[3] et de la gestion des  déchets radioactifs. Le prix futur de l'électricité est ainsi défini sur des bases fausses, conformément aux seuls intérêts de l'industrie nucléaire.

Le débat autour du partage de la «rente nucléaire» est basé sur un  postulat erroné : plutôt qu'une rente, c'est une dette sur plusieurs  générations que le programme nucléaire français a engendrée.  En effet l'équation est simple : si le coût du démantèlement, estimé entre 60 et 100 milliards €, alors que les provisions – utilisées par ailleurs – prévues par EDF ne représentent au mieux que 15 milliards €,  le reste sera supporté par les générations futures (aucune centrale française n'a encore été démantelée) qui devront payer pour se débarrasser de ces structures non-productives

Voir le Réseau "Sortir du Nucléaire"


[1] Costs of Generating Electricity, International Energy Agency and Nuclear Energy Agency, édition 2010

[2] La prolongation de la durée de vie des réacteurs passera nécessairement par le long et coûteux remplacement de nombreux éléments.

Le Point, 18 mai 2010, « La vétusté des réacteurs nuit à la puissance nucléaire française »

[3] Fin 2004, la Cour des Comptes estimait déjà à 65 milliards d'€ les coûts du démantèlement des installations nucléaires françaises.


3 commentaire(s)
[1]
Commentaire par politis
mercredi 23 juin 2010 15:18
On rappellera à Monsieur Jean-Marie Brom que le nucléaire n'a pas été financé par le contribuable français (cf. Marcel Boiteux récemment : "Mieux, jamais le contribuable n'a mis un sou dans l'entreprise. [...] Le contribuable n'a donc rien à réclamer, et le consommateur non plus" : http://www.easybourse.com/bourse/services/interview/1921/marcel-boiteux-edf.html).
Et deuxio, que l'exploitation par une structure publique n'est en aucun cas une garantie en matière d'efficacité et de sûreté : cf. le taux de dispobilité français ridiculeusement bas (78%) par rapport aux centrales belges (taux de disponibilité de plus de 90%) qui sont, elles, exploitées par des groupes privés.

[Réponse de l'auteur]
Deux réponses : jusqu'en 2004, EDF etait un EPIC (établissement public à caractère Industriel et Commercial) et à ce titre, dépendant de l'Etat pour ce qui concerne sa stratégie et son budget. Le programme nucléaire français, démarré en 1970, a bien été financé sur crédits d'Etat. Je pourrais également vous signaler que la part du nucléaire civil (génération IV, ITER....) représente entre 8 et 12% du budget de la recherche française... Et deuxio, si, comme vous le dites, la structure publique n'apporte aucune garantie en matière d'efficacité, ce n'est plus vrai en matière de sûreté. Le taux de disponibilité français reflète (aussi) la préoccupation de sûreté. Mais cela côute cher, en définitive, et justifierait à lui seul l'arrêt du nucléaire.
[2]
Commentaire par opsty
mercredi 23 juin 2010 18:09
Comment se fait-il que cette organisation ultra archi minoritaire donc qui ne represente absolument rien, meme les verts en sont revenus ,puisse trouver des tribunes dans la presse?Quand ils parlent de la consommation des particuliers ils ne savent pas ce qu'il s'y passe;chez les plus pauvres,la temperature est à 16 degres , un peu plus chez les autres,elle est a 19 c'est le plus gros poste de consommation tout le monde ,sauf une infime minorité ,fait attention et ils veulent faire croire que les gens riches ou pauvres se "vautrent" dans la consommation d'électricité.Comme toute entreprise,edf emprunte pour construire,mais sur le cout de chaque kw une part sert à amortir (rembourser) le pret consenti ainsi que les couts de démentelement qui sont provisionnés ,comme la loi le prevoie.Mais surtout ce qui les discalifies est le manque d'alternatives qu'ils proposent,si on supprime le nucléaire on tombe sur les energies fossiles,si on les suppriment aussi,il faut des panneaux photovoltaiques et de éoliennes partout mais à un prix du kw qui ruinera les gens sauf les bobos qui ramenent leurs gueules et qui ont les moyens (et encore)et ça ne suffira pas loin s'en faut,il faudra pédaler fort,mais ils sont si peu nombreux ,ayant toute leurs forces dans la langue,c'est pas avec ça que l'on vas produire du kw à moins de nous ramener au moyen age pour certains,pour d'autres à l'age des cavernes.C'est le nouveau "toc" qui regarde plus la psychiatrie.

[Réponse de l'auteur]
Ce qui disqualifierait ce commentaire, c'est peut être aussi son orthographe hasardeuse... autant que la réflexion de cette intéressante personne, qui semble ignorer que d'autres organisations "ultra archi minoritaires" comme Wise, Greenpeace, les Verts (eh oui...) ont proposé depuis pas mal de temps des propositions alternatives au nucléaire, dont on pourrait sans trop de difficultés se débarrasser en 10,15 ans ? Je vous conseille un petit tour sur leurs sites, ou à défaut un voyage vers Chernobyl... Vous y verrez que c'est le nucléaire qui nous ramènera au moyen âge.
[3]
Commentaire par jymesnil
mercredi 21 juillet 2010 19:56
le chiffrage du démantelement mériterait d'être détaillé, parce que EDF n'a jamais démantélé une centrale et n'a donc aucune expérience en ce domaine. Qu'il n'existe pas d'autres pays ayant plus d'expérience ! il est donc clair qu'à terme les générations d'un futur proche devront payer pour gardienner des centrales à l'arrêt, payer pour démanteler et retraiter sans production en contrepartie....que ces générations seront probablement confrontées à un problème d'approvisonnement en Uranium....ajoutons que ces générations auront également à charge la dette de la France et celle des retraites...ces sujets étaient largement évoqués par Jimmy Goldsmith (qui n'était pas un gauchiste), il y a 15 ans dans ses livres et force est de constater que la situation est toujours la même ! on ne sait faire !! on ne sait pas combien ça coûte !!! la mafia des grands corps est au pouvoir !!!
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